Titre : La vengeance du pardon
Auteur : Eric-Emmanuel Schmitt
Éditeur : Albin Michel
Nombre de pages : 336
Date de parution : 1er septembre 2017

C’est toujours un plaisir de suivre les histoires de ce formidable conteur qu’est Eric-Emmanuel Schmitt. Un auteur qui, de sa plume limpide, de ses historiettes avec un tournant philosophique,  fait réfléchir. 

Ce livre se compose de quatre histoires, réunies sous un titre en forme d’oxymore qui interpelle. Le pardon peut-il être une forme de vengeance?

Ces quatre nouvelles s’inscrivent plus ou moins dans la sphère familiale.

A leur naissance, les jumelles Barbarin se considèrent comme une seule entité jusqu’à la révélation de l’Autre à l’âge de quatre ans. Rien de plus complexe que les sentiments entre deux jumeaux. Leur amour inconditionnel se fissure rapidement d’un brin de jalousie.
Lily la préférée réussit toujours mieux, Moïsette vit dans son ombre mais est prête à tout pour surpasser sa sœur. A quatre-vingt ans, accusée par Fabien, son premier petit ami, Lily Barbarin doit comparaître au tribunal pour la mort de sa sœur. Comment Lily, si gentille, si prompte au pardon aurait-elle pu vouloir du mal à sa jumelle?

La seconde nouvelle, ma préférée, oppose le monde de la finance au monde paysan. William, propriétaire de la banque Golden, passe sa dernière nuit avant son accusation pour mise en place d’un système de Ponzi. C’est en fait son fils qui a mené cette opération de faux placements à haut risque avec les meilleurs clients de la banque. Il faut remonter au jeu de « chiche ou pas chiche » d’un groupe d’adolescent pour comprendre ce qui a mené William à un tel désastre.
Les simples d’esprit ne sont pas toujours les moins perspicaces et le lien animal reste le meilleur des témoignages d’amour.
«  Vous, les Parisiens, vous nous méprisez parce que nous vivons avec nos bêtes. Pourtant, vous devriez les observer, les bêtes, vous en tireriez des leçons. Chez les bêtes, jamais un mâle n’a oublié de nourrir ni d’élever ses petits. »
En regardant l’opéra Madame Butterfly, William comprend bien des choses.

La troisième nouvelle, sûrement la plus perturbante oppose le pardon d’une mère à l’absence de regrets d’un tueur en série. Alors qu’il a tué sa fille, Elise vient régulièrement à la prison rendre visite à Sam Louis, un tueur sans aucun état d’âme. Elle veut lui accorder son pardon.
«  Tu ne t’aimes pas, Sam, parce que personne ne t’a aimé. »
Elise peut-elle être la confidente de cet homme qui a toujours été repoussé par ses mères?
A-t-elle besoin de pardonner pour exister ou le pardon devient-il pour elle une forme de pouvoir?
Ici aussi, l’auteur utilise souvent les oppositions entre animal et humain. Sam le tigre deviendra-t-il plus humain et cela lui apportera-t-il le salut?

Enfin, Werner von Breslau, quatre-vingt-douze ans, soupçonné par son fils d’appartenir à un groupe de néo-nazis, découvre la légèreté, la grâce avec Daphné, sa petite voisine espiègle de six ans. Ensemble, ils vont lire Le Petit Prince de Saint-Exupéry. Werner va alors faire une étrange découverte qui le replonge dans ses exploits militaires d’aviateur pendant la seconde guerre mondiale. Pourra-t-il se pardonner sa faute? 

Eric-Emmanuel Schmitt nous pousse une fois de plus à nous questionner sur notre part d’humanité. Ceux qui pardonnent, comme Lily ou Mandine semblent ici plus sereins. Elise nous montre que pardonner paraît essentiel pour continuer vers l’avenir. Accorder son pardon à quelqu’un le renvoie souvent vers un questionnement personnel. C’est une manière de progresser. Ainsi William se remet en cause face au pardon naturel de Mandine, Sam Louis acquiert un peu d’humanité. Werner engage une bonne action.
Ce livre a attendu longtemps sur mes étagères. Sûrement parce que je savais à quoi m’attendre avec cet auteur. Mais c’est toujours un plaisir de le suivre dans ses histoires qui, malgré leur simplicité, posent des questions universelles et nous poussent à réfléchir sur notre conduite.
Je remercie Enna de m’avoir poussée à sortir ce recueil de mes étagères. Retrouvez son avis ici.

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

22 octobre 2018 à 9 h 42 min

Tu en parles mieux que moi car je trouve très difficile de parler de nouvelles 😉 Mais j’ai aussi apprécié les histoires et le style de l’auteur. C’est moi qui te remercie de m’avoir poussé à les lire 😉



22 octobre 2018 à 14 h 50 min

Je trouve cette idée très intéressante. la grandeur d’âme, la générosité peuvent parfois être écrasante, tout comme l’apparente perfection. L’enfer est-il pavé de bonnes intentions ou de bons sentiments ? Certainement…



23 octobre 2018 à 9 h 41 min

On s’habitue donc à l’auteur. Mais tu as raison, on le retrouve toujours avec plaisir.



Argali Lit
25 octobre 2018 à 23 h 02 min

Je l’ai laissé de côté. Tu me donnes envie de le lire.



27 octobre 2018 à 10 h 21 min

Une belle sortie de PAL alors ! Chouette 😉



31 octobre 2018 à 11 h 43 min

Un auteur qu’il me faut lire !



Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *