Titre : Le grand vertige
Auteur : Pierre Ducrozet
Éditeur : Actes Sud
Nombre de pages : 368
Date de parution : 19 août 2020

 

Chez Pierre Ducrozet, le roman se veut multiple et en mouvement à  l’image de nos sociétés contemporaines, métissées, mondialisées , fulgurantes.

Le grand vertige est à la fois un roman d’aventures, d’amour, d’espionnage, roman historique et écologique. L’auteur va du regard sur le monde aux analyses que peut en faire chaque personnage.

Dans la lignée de L’invention des corps qui illustrait la façon  d’habiter le corps, ce nouveau roman explore la manière d’habiter le monde. June, une jeune femme des années 2000, en est le questionnement.

«  Elle veut s’arracher à tout ce qui l’a faite. Elle voudrait la guerre et l’accord. Elle ne hait ni sa famille ni ses amis, ils lui sont simplement devenus indifférents. Cette fois-ci elle est prête, personne ne viendra l’arrêter ou essayer de faire d’elle quelqu’un d’autre. Les flammes s’élèvent. Elle ne sait pas par quel bout prendre l’espace qu’on lui a donné. Elle n’a pas l’intention de nous ennuyer longtemps. Elle est simplement l’enfant de son siècle : égocentrique, inconstante, embrouillée. Elle a tout, pourtant. Les siècles passés lui ont offert sur un plateau le savoir, la technique, la maîtrise. Elle a la possibilité de dire qu’elle n’en veut pas parce qu’elle a pu en jouir. Elle veut devenir personne. Capable de tout, faiseuse de rien. »

Elle n’hésite pas une seconde à répondre à l’appel d’Adam Thobias, le père de sa meilleure amie.

Adam Thobias, professeur franco-anglais et écrivain, est sollicité par le Parlement européen pour prendre la direction d’une commission internationale sur le changement climatique. Après une longue hésitation, il accepte à condition de pouvoir mettre en œuvre son réseau Telemaque, une entité de spécialistes envoyés aux quatre coins du monde pour dresser un état des lieux.

Thomas Régnier, un botaniste vivant au Canada, Mia Casal, anthropologue, Tomas Groben, Arthur Bailly, un photographe, June et des dizaines de scientifiques répondent à l’appel de ce génie ou ce fou qui a publié en 2009 Tremblements.

 » La loi du capital aboutit naturellement, comme l’écrivait Marx, à la destruction de la valeur d’origine, à savoir dans ce cas, la Terre et le vivant. »

Le passage du nomadisme à la sédentarité et la découverte du pétrole sont deux facteurs  influant gravement sur l’évolution de nos sociétés.

«  Le sédentaire invente la hiérarchie sociale, la religion à laquelle tous devront se soumettre, il invente le pouvoir politique et économique, il institutionnalise la guerre. Il assoit son règne. .. La légitimité change de camp. Les nomades sont rejetés hors de la cité. Ils portent dès lors la malédiction  des pauvres et des damnés. On les appellera tour à tour Gitans, Juifs, Touaregs, tous également sans terre et responsables de tous les crimes. Cette malédiction ne cessera plus jusqu’aux migrants de demain, porteurs eux aussi des maux de la terre dont ils hantent les bas-fonds. »

En rappelant rapidement l’histoire de la découverte du pétrole, l’or noir qui enrichit américains et russes, suscite la conquête des pays du golfe, on touche du doigt l’un des fléaux de notre monde. Une énergie tant attendue, déjà en voie de disparition qui par ses émanations est cause du réchauffement climatique et de la disparition de la nature.

Les politiques n’ont pas ou ne veulent pas de réponse. Adam Thobias et son équipe dont nous suivons les projets en Birmanie, en Chine, en Patagonie et ailleurs pourront-ils trouver une solution à ce défi bio écologique.

N’est-ce pas une utopie?

«  Nous savons tout à présent de la destruction des écosystèmes, mais rien n’y fait, notre fonctionnement économique demeure exactement le même, et nous continuerons à produire, consommer et dégrader jusqu’à ce que les mers montent tant qu’elles nous empêchent finalement de le faire. »

Déjà époustouflée par L’invention des corps, je retrouve le même souffle, la même intelligence. Non seulement, chaque phrase nous fait réfléchir sur notre monde mais l’auteur nous embarque dans des aventures vertigineuses, dans les forêts birmanes, en Chine, dans les fonds marins ou sur une île lointaine. C’est bien sûr un grand coup de cœur et j’ai l’impression que c’est ce que me réservera chaque roman de cet auteur.

 

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

3 septembre 2020 à 14 h 15 min

Un grand coup de coeur pour un grand vertige ?



7 septembre 2020 à 15 h 44 min

La couverture me vend du rêve. Et si en plus c’est bien…



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