Titre : Memorial drive
Auteur : Natasha Trethewey
Littérature américaine
Titre original : Memorial drive
Traducteur : Céline Leroy
Editeur : L’Olivier
Nombre de pages : 224
Date de parution : 19 août 2021
Retour sur un drame familial
Natasha Trethewey, photos et dossier du procès en main, se souvient de sa mère, assassinée le 5 juin 1985 par son ex-mari. Trente ans après ce drame, elle revient sur les lieux à Atlanta. Memorial drive s’étend du Memorial à Stone Mountain, trois sculptures surdimensionnées représentant les figures marquantes de la Confédération, rappel incontournable des suprémacistes blancs. Gwendoline, la mère fut témoin des combats pour les droits civiques grâce à l’engagement de ses parents dans le Mississippi, notamment suite au meurtre d’Emmett Till en 1955.
Une famille maternelle aimante
Natasha se souvient des vacances passées avec sa mère dans la ferme de ses grands-parents au Mississippi. Née en 1966 d’une mère noire et d’un père blanc d’origine canadienne, la petite fille connaît la fin de la ségrégation. Fille d’un couple mixte encore interdit par les lois ségrégationnistes, elle sera confrontée aux regards critiques.
Quel que soit l’espoir qu’elle avait pu nourrir au début, quand ils sont tombés amoureux, pensant que l’amour suffirait à contrer les défis créés par le racisme, le pays lui avait démontré qu’elle avait eu tort : que l’amour seul serait incapable de me protéger. Elle savait qu’en tant qu’enfant métisse – à mi-chemin entre eux deux-, je serais au bout du compte seule dans ce voyage pour comprendre qui j’étais, quelle était ma place dans le monde, tout en portant les fardeaux invisible de l’histoire, à cheval sur la métaphore.
Un divorce décisif
Le divorce de ses parents marque la fin du bonheur pour la petite Tasha. Ainsi, elle déménage avec sa mère à Atlanta, une ville « racialement progressiste » récemment désertée par les familles blanches de classe moyenne. Quand Gwendoline rencontre Joël alias Big Joe, les tourments commencent pour la jeune fille. Très vite, l’homme marqué par les années de guerre, tyrannise Tasha par son ingérence et se montre violent envers Gwendoline. Le récit se centre alors sur les années d’angoisse auprès d’un homme pervers et violent. Puis il culmine avec le document écrit par sa mère, le récit des années qui ont mené à la tragédie et le rapport de conversations téléphoniques enregistrées entre Gwen et Joël. Face à ce constat, on comprend une fois de plus que tout aurait pu être évité si l’entourage et la police avaient réagi.
Mémoire et culpabilité
Ce récit autobiographique est un témoignage vibrant sur le racisme et sur les violences conjugales. Natasha regrette l’indifférence de l’entourage face aux constats évidents de violence. Mais surtout, elle se sent coupable. Aurait-elle pu sauver sa mère? Toujours, elle revoit cette image de pochette d’album avec ce cri ultime, « une image de captivité et de souffrance ». Elle ne peut qui reconnaître sa mère.
Natasha Trethewey utilise les souvenirs pour faire vibrer les sensations ressenties dans son passé. Le bonheur enfantin des ses journées dans le Mississippi, les histoires fondatrices racontées par son père, les instants magiques et intimes auprès de sa mère. Mais aussi les regards stigmatisants de l’enfance et surtout celui de Big Joe, ce beau-père menaçant et violent.
Le journal intime était un exutoire essentiel. Ma mère savait que tout ce que j’avais besoin d’exprimer, il le faudrait l’écrire. J’ai toujours aimé le contact des livres, cette façon qu’ils ont de donner littéralement du poids aux mots et d’en faire un objet sacré que je peux tenir entre mes mains.
Ce roman est une étape nécessaire dans le parcours de l’auteur mais il est aussi un vibrant témoignage du racisme et de la violence conjugale.
Je remercie Léa et les Editions de l’Olivier pour cette lecture dans le cadre du Picabo River Book Club
Commentaires
Dommage que l’auteure n’en ai pas fait un roman. Le style non-fiction m’a parfois gêné.
Personnellement cela ne m’a pas gêné. Au contraire, certaines choses pâlissent à être romancées