Titre : Faber, le destructeur
Auteur : Tristan Garcia
Éditeur : Gallimard
Nombre de pages : 480
Date de parution : août 2013
Auteur :
Philosophe et romancier né en 1981, Tristan Garcia a reçu le prix de Flore pour son premier roman La meilleure part des hommes (collection Blanche, 2008, Folio n° 5002). Il a publié depuis Mémoires de la Jungle (collection Blanche, 2010, Folio n° 5306), En l’absence de classement final (collection Blanche, 2012), et, aux Éditions Denoël, Les cordelettes de Browser (2012).
Présentation de l’éditeur :
Dans une petite ville imaginaire de province, Faber, intelligence tourmentée par le refus de toute limite, ange déchu, incarne de façon troublante les rêves perdus d’une génération qui a eu vingt ans dans les années 2000, tentée en temps de crise par le démon de la radicalité.
«Nous étions des enfants de la classe moyenne d’un pays moyen d’Occident, deux générations après une guerre gagnée, une génération après une révolution ratée. Nous n’étions ni pauvres ni riches, nous ne regrettions pas l’aristocratie, nous ne rêvions d’aucune utopie et la démocratie nous était devenue égale. Nous avions été éduqués et formés par les livres, les films, les chansons – par la promesse de devenir des individus. Je crois que nous étions en droit d’attendre une vie différente. Mais pour gagner de quoi vivre comme tout le monde, une fois adultes, nous avons compris qu’il ne serait jamais question que de prendre la file et de travailler.»
Mon avis :
Faber est un être énigmatique, mi ange, mi démon. Orphelin très jeune, cet enfant maghrébin est recueilli par Marthe et Jean, un couple brisé par la mort de leur fille. A l’école de Mornay, Faber va défendre Basile, un jeune garçon devenu la tête de turc du méchant Romuald et Madeleine, une fille un peu garçon manqué. Les trois enfants vont très vite être inséparables et Basile et Madeleine idolâtrent le jeune Faber.
Dès les premiers chapitres, l’auteur nous fait comprendre toute l’ambiguité de Medhi Faber. Il est beau, intelligent, torturé, défenseur des plus faibles. Adulte, il n’est plus qu’un homme à l’écart de la société, sale et sans le sou.
Tristan Garcia excelle dans la construction de ce roman qui se dévoile par étape, alternant l’âge adulte des retrouvailles et les périodes de collège puis de lycée. Ce n’est que dans l’ultime partie que l’on comprend le drame de cette période adolescente.
Le récit montre aussi cette place difficile recherchée par l’adolescent. Être suffisamment fort pour ne pas se laisser manipuler par les meneurs, vouloir comme Faber être ce leader qui lève les foules, savoir accepter qu’un ami ait d’autres admirateurs. L’amitié peut parfois être possessive, étouffante. Et comment la vit-on lorsque l’on a grandi et que l’on a trouvé une place comme Basile ou Madeleine alors que Faber reste toujours un marginal?
» L’âge fait toute la différence, il sépare les hommes comme le font les genres, les classes et les cultures; mais il ne coupe pas seulement les individus les uns des autres, il écarte chaque individu de lui-même d’année en année. »
L’auteur parvient grâce à la construction et à l’ambiguïté de ses personnages à créer un récit complexe, inquiétant qui laisse une large part de mystère. Le style est assez classique et maîtrisé mais je n’aime pas spécialement les passages avec des verbes sans sujet.
Je regrette aussi un peu le dénouement qui se fait avec l’arrivée de Tristan, l’auteur, un jeune garçon un peu semblable au jeune Faber. Même si j’avoue qu’il donne finalement une vision un peu philosophique au personnage de Faber, une tentative d’explication de cet étrange personnage. Enfant perdu à la mort de ses parents, Faber a -t-il retourné sa peine ou sa culpabilité contre lui et la société ou est-ce un être foncièrement maléfique ? Les vies de Madeleine et Basile auraient elles été meilleures ou pires sans la rencontre de Faber.
La période, le lieu ont ils un impact sur les illusions perdues de cette jeunesse puisque l’auteur dit plusieurs fois que l’histoire est celle de » ces enfants de la classe moyenne… deux générations après une guerre gagnée, une génération après une révolution ratée ».
Je retiens deux points forts sur ce livre : la construction et l’ambiance particulière et prenante que l’auteur est parvenu à créer.
Tristan Garcia construit de très beaux romans sur les jeunes de sa génération nés dans les années 80, frappés par les fléaux de leur société. La meilleure part des hommes reste mon roman préféré de ce jeune auteur que je continuerai à suivre.
Commentaires
Pourquoi pas !
La meilleure part des hommes sommeille sur une étagère… Je crois que je devrais l’ouvrir… quand j’aurai fini les livres de la rentrée littéraire que je viens de recevoir.
Comme moi, tu te laisses happer par les nouveautés. Et de temps en temps une chronique vient réveiller un livre en sommeil dans la PAL. J’espère que tu aimeras cette lecture
J’avais détesté le précédent (Les Cordelettes de Browser) mais je vois que celui-ci n’a rien à voir, en tout cas pour ce qui est du thème. Je l’ai vu à la bibliothèque mais je n’ai même pas regardé la 4e… Je le prendrai la prochaine fois s’il est disponible.
Je n’ai pas eu le temps de lire Les cordelettes de Browser que j’avais pourtant noté. Peut-être un jour… J’espère que tu aimeras celui-ci