Titre : Le bastion des larmes
Auteur : Abdellah Taïa
Editeur : Julliard
Nombre de pages : 225
Date de parution : 22 août 2024
Le retour à l’enfance
Youssef a quitté Salé, sa ville natale marocaine, depuis une vingtaine d’années. Il est devenu professeur à Paris, loin des souvenirs d’enfance.
Mais le passé se rappelle à lui quand ses sœurs l’invitent au pays pour solder l’héritage de leur mère. Malika a élevé dans la misère du quartier de Hay Salam six filles et trois garçons. Les femmes portent la mémoire de la famille. Et elles se lamentent de l’exil des fils.
Mais pour Youssef revenir sur les lieux de l’enfance est douloureux. Enfant efféminé, il a été le jouet des vieux hommes dans la plus grande indifférence des voisins et de la famille. Peut-on pardonner à ceux qui vous ont sali et humilié ?
Le bastion des larmes
Sur place, il honore la mémoire de Najib, ami et ancien amant. Devenu trafiquant de drogue, Najib est revenu à Salé pour se venger. Sans pardonner à sa famille, il a endormi ses anciens détracteurs en les corrompant avec son argent.
Et je les forcerai à me respecter, à changer d’avis sur moi et sur les gens gays comme moi.
Mais une fois mort, l’opprobre retombe sur lui. Et il ne reste que Youssef pour honorer sa mémoire au bastion des larmes.
Le bastion des larmes est un lieu historique, un lieu de mémoire où les Slaouis venaient pleurer la disparition des leurs, déportés comme esclaves en 1260 lors de l’attaque de Salé par les Castillans.
Un roman sans concession
Depuis son coming out en 2006, Abdellah Taïa n’a aucun tabou pour dénoncer la condition des homosexuels en son pays. Entre souvenirs d’enfance, observations dans les rues et au hammam, témoignages de ses amis, conversations avec ses sœurs, Youssef continue à éprouver peur et honte. Comment ne pas éprouver de dégoût face à ce vieil homme qui abuse d’un enfant au hammam sans que personne ne réagisse.
Ils ont beau avoir l’air dignes et respectables, nous savons tous qu’ils sont à la fois des diables coquins et des dictateurs assumés dans le cœur.
Abdellah Taïa déploie comme à son habitude un récit extrêmement sensible. En convoquant les poètes, une chanteuse ou un film égyptien, il laisse entrer la lumière dans une histoire sombre. Face à l’hypocrisie, on aimerait croire qu’il y a encore une place pour les rêves. Et qu’ « au bout de la nuit…il n’y aura pas la nuit. »

Commentaires
Il me tente depuis sa sortie !
Tout à fait dans l’univers de l’auteur et toujours superbement écrit
Malgré la qualité de l’écriture de l’auteur, ce roman ne me tente pas.
Ce doit être intéressant, mais j’ai du mal avec les livres qui parlent d’abus sur des enfants…
Oui je comprends. Même si ça n’occupe pas tout le récit et que c’est souvent édulcoré, ça reste malsain. Mais quel courage de dénoncer l’hypocrisie de ses compatriotes
J’ai été très surprise par ma lecture, que j’ai beaucoup appréciée d’ailleurs, car j’y allais à reculons ! Comme quoi, parfois se lancer permet de découvrir de belles lectures 🙂
Le sujet est difficile mais récurrent chez l’auteur. J’aime son écriture à fleur de peau