Titre : L’évangile selon Yong Sheng
Auteur : Dai Sijie
Éditeur : Gallimard
Nombre de pages : 448
Date de parution : 7 février 2019

 

Yong Sheng naît en 1911 dans le district de Putian, au sud-est de la Chine. A sa naissance, un vieux chinois remet à son père des graines d’arbre pour le remercier de son hospitalité. Deux ans plus tard, une vieille femme aveugle lui confie que cet aguilaire, arbre rare à la sève précieuse, est un signe de destin peu ordinaire pour Yong Sheng.

Effectivement, Yong Sheng, homme bon, naïf, un peu lunaire, va connaître bien des aventures.

Yong, le père, charpentier et fabricant de sifflets de colombe transmet son art à son fils. En échange de deux sifflets de la marque Yong, la grand-mère de Yong Sheng demande au pasteur Gu, évangéliste américain et colombophile, de prendre en charge l’éducation du petit Yong. C’est la première expérience du garçon, là où il rencontre dans la résidence aux sept cours, Mary, la fille du pasteur et Jésus sur la croix.

Quand sa grand-mère est mourante, l’enfant est rappelé au domicile de son père. Il doit être marié pour conjurer le sort et contrer la maladie de la grand-mère. Yong Sheng n’a que quatorze ans quand il épouse Heiling, fille illettrée du village de pêcheurs voisin. Ce qui n’empêche pas la mort de la grand-mère !

Yong Sheng retourne chez le pasteur Gu, laissant Heiling chez son père. Il se fait baptiser par le pasteur, destin normal pour un fils de charpentier. Gu l’envoie à la faculté de théologie de Nankin afin de devenir le premier pasteur chinois.

Ce destin auquel Yong Sheng sera attaché toute sa vie se révèle un choix risqué. Tout rapprochement avec les missionnaires occidentaux, la lecture de la Bible seront jugés contre-révolutionnaires par la Chine de Mao.

Après la Longue marche, Yong Sheng, devenu papa revient à Putian et en 1942, il transforme la maison de Putian en orphelinat. Toujours, Yong Sheng revient au lieu de sa naissance, dans la chaumière de son père, à côté de l’aguilaire, qui, comme lui est souvent anéanti puis renaît de ses cendres.

La grande révolution culturelle s’abat sur la Chine. A quarante ans, le pasteur chinois est rééduqué par le travail, employé dans le pressoir à huile qui désormais remplace l’orphelinat. Sa fille Helai, souffre de la réputation de son père. Les écoles puis les emplois se refusent à elle, fille d’un « contre-révolutionnaire. »

Aux côtés du manchot, tous deux privés de droits civiques, Yong Sheng souffre en silence, toujours confiant et paisible.
Le bruit d’un sifflet de colombe, le dessin de grandes fresques, la copie de passages de la Bible avec son propre sang, l’odeur de l’aguilaire, les nouvelles de Mary, l’amour du Manchot pour sa fille, l’espoir de pouvoir être utile à son petit-fils, le calme apaisant de sa chaumière transformée au cours de ses expériences. Tous ces petits bonheurs suffisent à oublier les tortures et humiliations.

Près de vingt ans après le succès de Balzac et la petite tailleuse chinoise, Dai Sijie nous offre une fois de plus le destin d’un homme exceptionnel en pleine tourmente de la révolution culturelle en Chine. J’ai aimé ce personnage pour sa naïveté pacifique, son esprit optimiste, sa zénitude, ses choix spontanés face aux aléas.

Dai Sijie, en excellent conteur, nous immerge dans cette histoire inspirée de la vie de son grand-père. Il nous embarque dans les méandres d’une vie parfois incroyable d’un « Don Quichotte » perdu au milieu des révolutionnaires. On s’égare parfois en suivant une colombe, en partant sur les traces de Mary mais c’est chaque fois pour de vrais moments d’aventure. Dai Sijie n’hésite pas à porter un regard ironique sur les attitudes de ses compatriotes, sur les évènements de son pays. Ce qui ne manque pas de rajouter du charme au personnage inoubliable de Yong Sheng.

 

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

26 avril 2019 à 11 h 29 min

Il me le faut! Merci pour cette découverte, je ne savais pas que Dai Sijie « remettait le couvert ». La petite tailleuse chinoise m’avait bouleversée. Je vois des thèmes récurrents entre les deux romans. Hâte de le lire.



26 avril 2019 à 14 h 21 min

Je me disais bien que le nom de l’auteur me disait quelque chose…..



27 avril 2019 à 20 h 07 min

Comme j’avais aimé Balzac et la petite tailleuse chinoise !, je note tout de suite ce titre.



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