Titre : Le fils de l’homme
Auteur : Jean-Baptiste del Amo
Editeur : Gallimard
Nombre de pages : 240
Date de parution : 19 août 2021
Drame en puissance
En commençant son roman avec un témoignage ancestral sur l’errance d’une tribu primaire, Jean-Baptiste del Amo plante son décor au coeur d’une nature violente et implacable. Avec cette mélopée, l’insignifiance de l’homme s’inscrit dans la majesté de la nature.
Lorsque le père débarque après six ans d’absence au domicile de sa femme et son fils, l’instinct de prédation hante encore mon esprit. Et pourtant, le père parvient à convaincre sa femme d’un possible renouveau en passant l’été aux Roches, une maison en pleine forêt appartenant autrefois au grand-père.
De père en fils
L’enfant est très proche de sa mère, aimante et douce malgré les fortes migraines qui parfois la terrassent.
La mère est tempétueuse, entière et passionnée, sans cesse tiraillée par le doute, le remords, des élans de gaieté et de profonds abattements.
Il garde certaines réserves envers ce père retrouvé. L’homme tente pourtant de lui faire plaisir en l’emmenant à la fête foraine, en lui faisant découvrir des fossiles, en lui fabriquant une fronde ou lui apprenant à tirer au pistolet.
Mais souvent, la folie semble posséder cet homme, hanté par l’éducation d’un père sauvage et autoritaire. Cet homme ne croit plus en l’amour et perpétue la violence de son enfance.
Car les hommes, plus qu’aucune autre bête peuplant cette foutue terre, naissent avec ce vide en eux, ce vide vertigineux qu’ils n’ont de cess de vouloir désespérément combler, le temps que durera leur bref, leur insignifiant, leur pathétique passage en ce monde, tétanisés qu’ils sont par leur propre fugacité, leur propre absurdité, leur propre vanité, et que quelque chose semble leur avoir fourré dans le crâne l’idée saugrenue qu’ils pourraient trouver dans l’un de leurs semblables de quoi remplir ce vide, ce manque qui préexiste en eux.
Une tension soutenue
Malgré quelques pauses magiques comme ce moment de complicité entre la mère et le fils lors d’une baignade dans le torrent ou les balades en forêt jusqu’à un troupeau de chevaux sauvages, la tension est omniprésente.
Un acharnement du père à créer un potager dans un sol pierreux, un orage violent qui finit de transformer la maison en ruine sont autant de menaces impalpables comme l’annonce d’un drame imminent que rien ne pourra empêcher.
Aux côtés de cet enfant qui découvre la cruauté du monde des adultes, nous sommes plongés dans une spirale implacable. La tension monte graduellement jusqu’à l’horreur, l’indicible. Et pourtant, dans sa langue enveloppante, avec ses descriptions remarquables d’une nature belle et sauvage, l’auteur nous enchaîne à un récit puissant impossible à lâcher.
Une très belle découverte d’auteur. Et fort heureusement, j’ai deux autres titres qui attendent dans ma pile à lire.