Titre : Les lumières d’Oujda
Auteur : Marc Alexandre Oho Bambe
Editeur : Calmann-Levy
Nombre de pages : 240
Date de parution : 19 août 2020
Après son arrivée à Lampedusa, il vivote à Rome. Y rencontre l’amour avant d’être arrêté, emprisonné pour trois ans puis reconduit au Cameroun, son pays d’origine. Il, est le narrateur de ce roman documentaire. Nous ne connaîtrons pas son nom.
A Douala, il retrouve sa grand-mère, un peu honteux d’avoir raté ce voyage pour lequel elle lui avait donné toutes ses économies. Mais Sita le félicite d’être en vie et de ses conseils avisés l’aide à faire face à la violence. On ne peut se construire sans l’autre. Le jeune homme s’engage dans une association. Il y prend la parole pour mettre en garde les jeunes contre les dangers de l’immigration. Pour cette mission, il se rend parfois à Oujda chez le Père Antoine, un prêtre français qui accueille de jeunes réfugiés de Guinée, du Mali, du Sénégal…Et y rencontre Imane, une jeune marocaine aux yeux vert émeraude, qui met ses études de droit au service du Père Antoine.
C’est là que le narrateur rencontre et donne la parole à cette jeunesse meurtrie, prête à prendre la route pour trouver un peu de liberté et réaliser leurs rêves. Ils s’appellent Ibra, Yaguine et Fodé. Eux qui rêvent d’écrire, de chanter leur RAP pour réapprendre à parler. A chacun, il pose cette question lancinante : Pourquoi on part? Ce lieu de rencontres créé par le Père Antoine est une bulle d’humanité pour tous ceux qui ont vécu la violence d’un monde qui en manque cruellement.
Dans le cadre de ces associations, le narrateur et Imane vont au Liban, en Grèce et en France visiter les camps de réfugiés. Partout, des membres d’association luttent pour apporter un peu d’humanité dans ces lieux de rétention. A Calais, Imane retrouve sa sœur jumelle qui a choisi de vivre en France et qui donne des cours de français dans ce que l’on appelle la jungle. Et toujours les voix des jeunes comme Rodrigue viennent alimenter cette enquête sur ceux que nous n’appelons pas les migrants mais les fugees, les marcheurs, les rêveurs, les combattants d’espérance.
» Elles et Ils, Ulysse modernes.
Résistants, résilients magnifiques. »
Dans ce texte de forme hybride, Marc Alexandre Oho Bambe transfigure la violence par la poésie. Sans ignorer les épreuves d’une jeunesse sacrifiée par la mal-gouvernance de « présidents jusqu’à la mort », les traumatismes et séquelles physiques et psychiques des rescapés, l’auteur veut absolument partir en quête d’un reste d’humanité, de la beauté du monde, de la force de l’amour comme celui qui unit le narrateur et Imane. Les personnages magnifiques, transcendants, le rythme des mots, la beauté et la force des textes nous emportent, suscitent au fond de nous une intense émotion.
« Ce texte ne changera pas grand-chose, et même rien, au désordre du monde, mais il prend parti.
Pour la beauté. La dignité. La justice.
Il invite à un autre regard, sans prétention.
Point de « question migratoire » ici ni de « migrants ou migrantes », juste un bouquet de mots.
Et, peut-être, d’émotions.
D’orage, d’amour et d’espérance.
Pour dire toute ma solidarité à des enfants, des femmes et des hommes comme nous. »
Je vous conseille ce très beau roman qui rend hommage au travail des associations comme celle d’Oujda qui existe réellement grâce au Père Antoine. Espérons que les lumières d’Oujda fasse d’une utopie quelque chose qui un jour existera vraiment.
Je remercie Babelio et les Editions Calman-Lévy pour l’attribution de ce roman lors de l’opération Masse Critique spéciale Rentrée Littéraire
Commentaires
Ce livre est dans ma pile, merci de me le rappeler!
Fais le passer en haut de la pile
c’est le style qui me freine un peu mais je finirai probablement par le lire car les avis convergent pas mal 🙂
Cela se lit très bien
Je suis comme toi …
Je suis entièrement d’accord avec toi ! C’est un très beau texte.
Je venais de lire peu de temps avant le roman de Guillaume Poix, Là d’où je viens a disparu qui m’a beaucoup touchée aussi. Autant dire que je suis très sensible à cette cause. Mais pas facilement influençable car je n’ai pas accroché au roman Mur Méditerranée de Louis-Philippe Dalembert.
Mon coup de coeur de la rentrée : j’ai aimé cette langue envoutante.
Oui je me souviens de ton conseil et je ne regrette pas de l’avoir suivi