Titre : S’adapter
Auteur : Clara Dupont-Monod
Editeur : Stock
Nombre de pages : 200
Date de parution : 25 août 2021
Lorsque l’enfant paraît
Une famille cévenole attend son troisième enfant. La naissance est source de réjouissance. Au bout de trois mois, la mère perçoit une anomalie. L’enfant ne babille pas et il semble atteint de cécité. Un scanner met en évidence un problème au cerveau. L’enfant ne pourra jamais ni marcher, ni tenir sa tête, ni parler. La famille est sous le choc, la vie ne sera plus jamais la même. Les pierres du muret qui nous content cette histoire en sont le témoin.
Une famille bouleversée
Les parents sombrent et se débattent avec les difficultés administratives. L’aîné de la famille, solitaire et royal, s’occupe de ce petit frère pas comme les autres. Il développe avec l’enfant une relation fusionnelle. Il lui raconte la montagne, lui fait la lecture, lui parle, lui apprend le toucher. Si parfois, il tente de s’éloigner pour éviter la souffrance, il revient toujours en grand frère protecteur.
La cadette ignore ce petit frère qu’elle a un jour failli casser. Sa tristesse, elle l’évacue dans la rage. Elle sera une adolescente rebelle, toujours prête à boxer, même les pierres de la montagne. Sa grand-mère est son seul refuge de tendresse.
La grand-mère la hissait à la hauteur des autres. Elle lui offrait une normalité. Beaucoup plus tard, devenue adulte, la cadette s’entendrait dire à une amie : « Si un enfant va mal, il faut toujours avoir un oeil sur les autres. »
Un sujet classique et émouvant
Beaucoup d’auteurs évoquent l’enfance inadaptée, le handicap, le rejet d’une société, les douleurs de la famille. C’est un sujet inévitablement émouvant. Bien évidemment, on ne peut être que touché par ce genre de lecture. Un peu mal à l’aise aussi par ce regard externe sur une douleur que l’on ne peut apaiser.
Clara Dupont-Monod se démarque par son style, sa sensibilité pour ces personnages montagnards, taiseux et dignes, sa douceur dans l’illustration d’un lieu qui fait partie de la famille. Mais surtout, elle nous accroche le coeur avec son dernier personnage.
Le dernier
Ce roman, touchant et magnifiquement écrit, aurait pu se noyer dans la multitude des récits sur l’enfance inadaptée sans ce dernier personnage.
Alors que l’aîné et la cadette ont quitté la maison pour vivre leur vie d’adulte, avec des blessures irréversibles, les parents attendent un nouvel enfant. Celui qu’on appèlera « le dernier « devra apprendre à vivre dans cette famille blessée mais courageuse, s’adapter à l’ombre de l’absent qui plane sur la maison malgré le silence de ses habitants.
Autour d’eux veillait la montagne. Elle se manifestait par mille bruits, elle couinait, grinçait, éclatait de rage ou de rire, murmurait, tonnait, ronronnait, susurrait et sans doute l’enfant absent, qui avait l’ouïe, avait pu percevoir cela. Sans doute avait-il admis que la montagne est sorcière ou princesse médiévale, ogre doux, dieu antique ou bête méchante.
Sensible, amoureux de la nature, le dernier perçoit chaque tressaillement de ses parents, chaque silence de son aîné, chaque histoire de la cadette. Au coeur de cette montagne ensorceleuse, avec l’enfant absent au creux de lui, il se fera sorcier pour apaiser les blessures d’une famille dont il veut pleinement faire partie.
Un roman d’une grande sensibilité au coeur d’une nature puissante où, pourtant, les arbres parviennent à s’enraciner sur les pierres.
Commentaires
j’ai beaucoup aimé son approche avec la réaction de chaque membre de la fratrie, notamment l’aîné mais chacun a une réaction bien spécifique…
L’idée de faire raconter l’histoire par les pierres, témoins immuables…
Du grand art 🙂
C’est surtout le dernier qui m’a touchée. Magnifique auteure
La souffrance de chacun des enfants, (rare que la littérature parle de la fratrie de la famille touchée par le handicap) est décrite avec bcp de justesse pour permettre de montrer combien chacun apprend de cette situation particulière ! Pour moi, un vrai ♥️
La fratrie c’est ce qui donne tout l’intérêt au roman en donnant un nouveau regard sur le handicap
Mon coup de coeur de cette rentrée.
Un roman très touchant. J’ai aimé avoir le point de vue de la fratrie. Je ne sais pas si c’est mon préféré de l’auteure.
j’ai adoré ! Plus j’avançais, plus j’appréciais avec une thématique qui n’était pas gagnée d’avance, l’autrice s’en sort avec brio.
J’ai surtout aimé la dernière partie