Titre : Le pain perdu
Auteur : Edith Bruck
Littérature italienne
Titre original : Il pane perduto
Traducteur : René de Ceccatty
Editeur : Editions du Sous-Sol
Nombre de pages : 176
Date de parution : 7 janvier 2022
L’enfance saccagée
Dikte a treize ans en 1944. Elle est la dernière de six frères et soeurs. Comment comprendre la montée du nazisme quand on a l’innocence de l’enfance ?
Lorsque la famille se fait arrêter, la mère s’inquiète pour son pain en train de cuire. Le pain perdu. Mais c’est sans se douter de ce qui les attend. Ce doigt qui d’un mouvement à droite ou à gauche les conduit vers la mort ou vers les camps de travail. Dikte, séparée de sa mère, est conduite avec sa soeur Judit à Birkenau.
La faim, les poux, la peur d’être sélectionnées, les maladies et les suicides contre le fil barbelé et électrifié nous occupaient l’esprit jour et nuit.
De camp en camp
Dans un récit dépouillé, l’auteur revit ce long chemin, cet enfer de Birkenau, Dachau, Bergen-Belsen jusqu’à l’arrivée des américains. Edith Bruck a la pudeur de ne pas s’appesantir sur l’horreur des camps. Mais elle en dit suffisamment pour comprendre l’errance de celle qui ne trouve plus sa place. Plus rien n’est possible dans le village dévasté de son enfance. Elle rejoint ses frère et soeurs en Israël, sans pouvoir s’y ancrer. Le rêve d’une terre promise est parti en fumée.
Nos vrais frères et soeurs sont ceux des camps. Les autres ne nous comprennent pas, ils pensent que notre faim, nos souffrances équivalent aux leurs. Ils ne veulent pas nous écouter : c’est pour ça que je parlerai au papier.
Après plusieurs rencontres difficiles, elle suit une compagnie de ballet. C’est finalement en Italie qu’elle trouve la paix.
Le refuge de l’écriture.
A quatre vingt-dix ans, alors que la vue et la mémoire commencent à défaillir, Edith Bruck ressent le besoin d’écrire Le pain perdu. Pour témoigner une fois encore.
Les mots à dire ne cessent d’augmenter. Si c’étaient des enfants conçus, j’accoucherais d’autant que de disparus.
Le dernier chapitre est une lettre à Dieu. Un Dieu que sa mère invoquait pour tout et n’importe quoi. C’est une lettre de rage envers celui qui est resté sans réaction. Mais elle le remercie de pouvoir témoigner sans haine auprès des jeunes générations. Ce récit en est un exemple marquant.
Commentaires
Quel livre fort, heureux de le voir chroniqué ici. J’aime beaucoup le passage sur la difficulté de transmettre, de faire partager ce qui a pu être vécu dans les camps (et notamment la faim)
Un témoignage nécessaire. Et il est ici pudique et équilibré.
A noter pour les prochaines lectures autour de l’Holocauste, donc..
Un dernier chapitre qui doit être plein d’émotions.
Et qui résonne de manière universelle. Mais tout le livre est émouvant