chalandonTitre : Le quatrième mur
Auteur : Sorj Chalandon
Éditeur : Grasset
Nombre de pages : 336
Date de parution : 21 août 2013

Auteur :
Sorj Chalandon, né en 1952, a été longtemps journaliste à Libération avant de rejoindre Le Canard Enchaîné. Ses reportages sur l’Irlande du Nord et le procès Klaus Barbie lui ont valu le Prix Albert-Londres en 1988. Il a publié, chez Grasset, Le Petit Bonzi (2005), Une promesse (2006, prix Médicis), Mon Traître (2008), La Légende de nos pères (2009), Retour à Killybegs (2011, Grand Prix du Roman de l’Académie Française).

Présentation de l’éditeur :
L’idée de Sam était folle. Georges l’a suivie.
Réfugié grec, metteur en scène, juif en secret, Sam rêvait de monter l’Antigone d’Anouilh sur un champ de bataille au Liban.
1976. Dans ce pays, des hommes en massacraient d’autres. Georges a décidé que le pays du cèdre serait son théâtre. Il a fait le voyage. Contacté les milices, les combattants, tous ceux qui s’affrontaient. Son idée ? Jouer Anouilh sur la ligne de front. Créon serait chrétien. Antigone serait palestinienne. Hémon serait Druze. Les Chiites seraient là aussi, et les Chaldéens, et les Arméniens. Il ne demandait à tous qu’une heure de répit, une seule. Ce ne serait pas la paix, juste un instant de grâce. Un accroc dans la guerre. Un éclat de poésie et de fusils baissés. Tous ont accepté. C’était impensable.
Et puis Sam est tombé malade. Sur son lit d’agonie, il a fait jurer à Georges de prendre sa suite, d’aller à Beyrouth, de rassembler les acteurs un à un, de les arracher au front et de jouer cette unique représentation.
Georges a juré à Sam, son ami, son frère.
Il avait fait du théâtre de rue, il allait faire du théâtre de ruines. C’était bouleversant, exaltant, immense, mortel, la guerre. La guerre lui a sauté à la gorge.
L’idée de Sam était folle. Et Georges l’a suivie.

Mon avis :
Le quatrième mur est dans aucun doute le plus lourd des romans de la rentrée que j’ai lus.
Il est question de tragédie, celle d’Antigone ( de Sophocle ou d’Anouilh), cette figure mythique qui symbolise dignité et honneur, qui est le symbole du non au pouvoir portant ses convictions jusqu’à le mort. Mais aussi la tragédie de la guerre au Liban.
Georges a toujours été assez violent dans la défense de ses convictions. Défenseur du jeune Bachir en classe, puis militant pour la défense de la Palestine ou contre les bandes d’extrême droite, il applique la devise « oeil pour oeil, dent pour dent ».
Lorsqu’il rencontre Samuel Akounis, un juif grec opprimé par le régime des colonels, il entend le message  » La violence est une faiblesse » et adhère à son projet de mettre l’Art au service de la Paix. Sam veut monter Antigone à Beyrouth en réunissant des acteurs des différentes origines. Antigone est palestinienne, Créon, chrétien, Hémon, druze, Eurydice et les gardes chiites, Ismene arménienne et la nourrice chaldéenne. Il n’y aura qu’une seule représentation au coeur de la zone des combats. Ce sera une trêve au milieu  de la haine.
Sam, mourant confie ce projet à Georges qui quittera sa famille pour tenter de réaliser la dernière volonté de son ami.
 » Il a dit que la paix ne se faisait pas avec le visage poudré du clown. »
Georges va réunir ces ennemis qui peinent à laisser leurs convictions à la porte du théâtre. Même si les hommes et les femmes, acteurs, actrices font des efforts, la sombre réalité continue et tous se retrouvent sous les bombardements israéliens et au coeur du massacre de Sabra et Chatila.
Comment George peut-il supporter   » les misères de la paix » lorsqu’il revient à Paris, vivre une vie de famille avec la mémoire de la guerre ?
Quelle peut être l’issue décente et digne alors que le rêve de Sam se révèle une utopie ?
A l’image d’Antigone, l’idéalisme de Sam se trouve vite confrontéà la réalité politique.
Ce n’est pas toujours simple de comprendre les enjeux d’un conflit aussi compliqué, de situer les différents camps (sunnites, sionistes, phalangistes…) mais la force de ce livre se trouve dans l’énergie, l’amour d’hommes et de femmes au service d’une cause, d’une utopie, d’une volonté de passer un message de paix dans un enfer de guerre.
J’ai apprécié aussi que l’auteur mette délicatement en opposition la « bêtise » de bandes de manifestants face aux grands problèmes mondiaux, des slogans parfois utilisés sans réfléchir, la futilité des soucis d’une population par rapport aux conditions de vie d’un peuple en guerre.
Le quatrième mur, au théâtre est le mur virtuel, intellectuel qui sépare  les acteurs du public. Ici le quatrième mur donne sur un paysage de guerre.

C’est un livre fort, violent à l’image de la tragédie grecque.

RL2013

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

22 octobre 2013 à 8 h 21 min

Entièrement d’accord. Ce roman a été un coup de coeur pour moi ! Le livre le plus fort de la rentrée pour l’instant.



22 octobre 2013 à 9 h 27 min

J’ai eu le plus grand mal avec un de ses précédents livres (une promesse), et encore plus de retenter avec un autre titre. Mais celui là traite d’un thème qui ne m’attire pas du tout.



22 octobre 2013 à 18 h 53 min

J’ai aimé une promesse et j’ai vu Sorj Challandon la semaine dernière dans : Au field de la nuit, il m’a cloué … J’ai donc très envie de le lire également !



clara
22 octobre 2013 à 19 h 28 min

un livre qui se démarque des autres de cette rentrée, oui !



24 octobre 2013 à 7 h 42 min

Je n’ai toujours pas lu Sorj Chalandon, mais je ne lis que des critiques élogieuses à son endroit. Je compte bien m’y mettre un de ces jours, mais à moins que ce roman ne soit dispo à la médiathèque, je commencerais par un roman sorti en poche.



alexmotamots
24 octobre 2013 à 9 h 10 min

Il me tarde de le lire.



eimelle
28 octobre 2013 à 8 h 48 min

une lecture que j’ai bcp appréciée, à l’image d’Antigone



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