Titre : Les aventures de la foufoune
Auteur : Leonora Miano
Editeur : Seuil
Nombre de pages :168
Date de parution : 11 octobre 2024
L’origine du monde
Le premier de dix monologues qui composent ce livre, pose les bases de la société matrilinéaire africaine. Celle qu’on appelle L’Incréée, issue de Magamba, l’océan primordial, a créé les fleuves, les rivières et les lacs de sa première masturbation. Puis au fil de ses déambulations, les plantes et les bêtes virent le jour. Après la première nuit, elle crée son partenaire masculin.
Ekwa Mwato, la première femme à l’image de l’Incréée, sera la grande initiatrice du monde. Elle est le symbole de toutes ces femmes qui dirigent leur vie en fonction de leurs sens. Celles que nous rencontreront au fil des pages suivantes.
L’endoctrinement féminin
Le second monologue met en scène une femme mature en relation avec un jeune homme. Relation taboue car si les hommes peuvent vieillir en paix, les femmes vieillissantes sont reléguées au placard.
Rituel de la défloraison, stigmatisation des joyeuses célibataires, le viol comme arme de guerre, aliénation consentie, le pity fuck, l’accord parfait, le make me white, le féminisme sont les thèmes principaux des autres chapitres.
Les femmes sont capables de tous les défis mais elles sont réduites au néant dans l’intimité. Le colonialisme a mis fin à la société matrilinéaire.
Une femme est dite féminine quand elle répond aux attentes esthétiques du mâle dominant, et seulement dans ce cas.
Très tôt, on leur apprend qu’un homme ne peut se contenter d’une seule femme. La question de l’amour s’absente des contes africains
Le féminisme fut inventé dans les sociétés s’étant voulues romantiques.
Les filles sont élevées pour séduire et refuser le mal. Les aînées apprennent aux femmes à taire le viol.
Le foyer doit être pour les femmes africaines le lieu de l’épanouissement.
Dans ce cas, les femmes ne sont-elles pas responsables de la domination masculine, nous dit Leonora Miano.
Sortir des clivages
Leonora Miano refuse d’investir dans le mariage et la maternité. L’obsession ne doit pas être l’amour marital mais l’amour de soi.
Peut-on aimer de cet amour romantique celui qui est à la fois le maître incontestable et l’éternel enfant à qui des soins empressés sont dus à tout moment ? Celui derrière qui il faut sans arrêt faire le ménage et dont il faut taire les failles ?
Une femme peut aimer sa liberté et le corps des hommes. Et cela ne doit pas être inconvenant dans notre société.
Leonora Miano ose un récit sensuel, subversif, sans tabous. C’est un livre qui fait réfléchir sur le féminisme, le patriarcat. Avec toujours la belle écriture et l’intelligence d’une auteure franco-camerounaise qui rêve d’une réelle identité afropéenne en sortant du piège de la race.
Commentaires
Le titre ne me disait rien qui vaille, mais j’aime la plume de l’auteure et ton avis me donnent envie de découvrir ce livre.
Excellente plume. Ravie de t’avoir donné envie de le lire