Sur la route de jostein

Titre : Saint-Phalle, Monter en enfance
Auteur : Gwenaëlle Aubry
Editeur : Stock
Nombre de pages :  280
Date de parution : 8 septembre 2021

 

Niki de Saint-Phalle

Belle, extravagante, Niki de Saint-Phalle s’est construite sur les ruines de son enfance. Née en 1930, violée par son père à l’âge de onze ans, elle a été maltraitée par sa mère. Unie dans un premier mariage à l’écrivain américain Harry Mathews, elle quitte l’Amérique et ses deux enfants en 1961 pour rejoindre Jean Tinguely à Paris. Le sculpteur devient son amant et son âme soeur.

Si Saint Phalle et Tinguely ont réussi à se nourrir l’un de l’autre sans se dévorer, c’est peut-être parce que leur histoire, leurs sculptures monumentales et leurs machines inutiles, reposent sur le socle d’une camaraderie à la fois très sexuelle et étrangère au genre : une alliance hermaphrodite, là encore, soudée par un grand désir, mais dont les deux moitiés peuvent être, comme celles des êtres-sphères du Banquet, l’une et l’autre femme, ou homme, et bien sûr aussi, à tour de rôle, à tour de roue, tantôt femme et tantôt homme.

Le jardin des Tarots

C’est en visitant Le Jardin des Tarots en Toscane que Gwenaëlle Aubry nous plonge dans l’univers extravagant de Niki. La sculptrice a su qu’elle devait créer ce jardin en visitant le parc Güell construit par Gaudi sur les hauteurs de Barcelone. Elle rêvait de construire son palais comme le facteur Cheval.

Chaque chapitre du roman commence par la description d’une sculpture du Jardin des Tarots ( La force, le Soleil, la Papesse et le Magicien, L’Empereur, L’Impératrice…). C’est la porte d’entrée pour découvrir une partie de sa vie et de son oeuvre.

Monter en enfance

Saint Phalle n’est pas tombée, elle est montée en enfance. Son lourd legs elle l’a, comme on souffle un métal, transmué en légèreté.

Loin de s’apitoyer sur son enfance monstrueuse, elle en construit des oeuvres d’art. Ses films sont choquants, ses sculptures extravagantes, ses peintures sont dessinées avec des tirs de carabine. De ses blessures, elle fait une force et fait éclater la puissance féminine.

Le regard de Gwenaëlle Aubry

Romancière, essayiste et philosophe, Gwenaëlle Aubry prend le parti de l’enfance pour aborder la vie de Saint Phalle. Une enfance traumatisante dont l’artiste n’est jamais vraiment sortie. Au fil des descriptions enchanteresses des différentes parties du Jardin des Tarots, l’auteure brosse le portrait d’une femme, mêlant sa vie et son oeuvre. Elle peint son extravagance mais pointe aussi sa fragilité. Saint Phalle s’est longtemps protégée à l’intérieur de l’Impératrice, y reconstruisant sa mère.

On ne sait jamais au détour de quel sentier l’enfance, soudain, vous sautera au visage.

Gwenaëlle Aubry a passé sept jours au jardin des Tarots. A son retour à Paris, elle a commencé à écrire le livre. La mort de ses grands-parents a replongé l’auteur dans l’enfance. Suivre Saint-Phalle fut un moyen d’échapper à la noirceur du monde.
Une très belle évocation de celle qu’elle ne nommera que Saint Phalle comme pour lui épargner la fragilité féminine de Niki.