Titre : Lady Chevy
Auteur : John Woods
Littérature américaine
Titre original : Lady Chevy
Traducteur : Diniz Galhos
Editeur : Albin Michel
Nombre de pages : 470
Date de parution : 1 février 2022
Un terrain de révolte
Faisant fi de son environnement, Amy Wirkner vit dignement dans son petit coin de l’Ohio. Elle s’investit complètement dans ses études, motivée à décrocher une bourse pour intégrer l’Ohio State University. Assistante du Docteur Rogers, elle rêve de devenir vétérinaire.
Et pourtant, son milieu familial est à la fois modeste et perturbé. La famille vit dans un mobil home depuis l’incendie qui a coûté la vie aux grands-parents paternels. Le père a cédé les droits miniers de son terrain à une entreprise d’extraction de gaz de schiste. Depuis il sombre dans l’alcool, impuissant à retenir sa femme qui se perd chaque nuit dans des aventures sadomasochistes.
Le puits de fracturation hydraulique pollue l’eau de la vallée. Les émanations de radon et de méthane sont sûrement responsables de la difformité du petit frère d’Amy.
Depuis son enfance, Amy est le souffre-douleur de ses camarades de classe à cause de son poids. Tous l’appellent Chevy parce qu’elle a un arrière-train aussi imposant qu’une Chevrolet. Elle peut toutefois compter sur l’amitié de Paul, un rouquin dont le père est en train de mourir de la maladie du charbon et de Sadie, une fille des beaux quartiers qui salit son corps pour oublier la mort de son père et de son frère dans un accident de voiture.
Une héroïne inoubliable
Amy a le sens de l’amitié. Aussi, quand son ami Paul lui demande son aide pour faire le guet pendant qu’il pose une bombe artisanale sur un réservoir, elle finit par accepter. Malheureusement elle emmène le fusil à pompe que son oncle Tom, un vétéran raciste, lui a offert. L’aventure éco-terroriste tourne mal.
Brett Hastings, un policier philosophe rédempteur de torts, mène l’enquête au sein de cette petite communauté. Le roman prend alors un rythme passionnant. Le suspense s’inscrit dans la complexité des personnages.
Car Lady Chevy est prête à tout pour sauver son rêve. Difficile de rester droite quand la famille se disloque, que la haine raciste est inscrite dans les gènes de la famille maternelle, que l’usage des armes à feu est banalisée, que les entreprises font des profits au détriment des ouvriers sans tenir compte de leur survie. La graine de la révolte pousse aisément sur un terreau aussi noir.
Amy et le troublant Hastings n’en finissent pas de nous étonner.
Toute la liberté dont on dispose, tous autant que nous sommes, c’est de choisir sa propre voie.
Un premier roman remarquable
Pour son premier roman, John Woods tisse une toile parfaite pour illustrer la descente aux enfers d’une jeunesse confrontée à la misère sociale, économique et environnementale. Racisme, suprémacisme, banalisation des armes à feu, chômage, pollution, comment espérer un meilleur avenir que celui de ses parents.
Ce sont nos différences qui nous définissent, qui nous séparent à jamais, malgré tous nos grands discours sur l’égalité .
Loin de tout misérabilisme, John Woods s’attache à donner du rythme et de la complexité à son récit. Et il y parvient aisément en poussant ses personnages vers des comportements inattendus, en dosant parfaitement en chacun le bien et le mal.
Commentaires
Je n’ai pas trouvé le bien dans les personnages, alors le roman m’a semblé froid, trop manichéen, l’auteur semblant prendre ses personnages de haut… mais je me sens seule dans ce ressenti !
Amy est attachante par résilience. Tout la pousse vers le mal et pourtant elle est forte et volontaire, tenue par un projet d’avenir. Elle a aussi le sens de l’amitié envers Paul et Sadie, le sens de la famille et l’amour des animaux. Quant à Hastings, il est beaucoup plus froid mais quelque part c’est un justicier.
Vu comme ça… merci, même si mes réserves restent fortes.
Ca a l’air noir, quand même.
Oui, plutôt