Titre : Terres promises
Auteur : Bénédicte Dupré La Tour
Editeur : Les éditions du Panseur
Nombre de pages : 320
Date de parution : 22 août 2024
Destins croisés
Ce roman est construit comme une succession de portraits de personnages. Ce sont comme des petites nouvelles imbriquées puisque le personnage principal d’une histoire peut apparaître comme personnage secondaire ailleurs. De plus, ces sept portraits sont séparés par des lettres écrites par un huitième personnage. Elliott Burns, déserteur, écrit à sa famille et ses amis avant son imminente pendaison. Au fil des lettres, son passé se dessine.
Les personnages de ce roman sont des femmes qui refusent leur sort, qui prennent leur destin en mains pour parfois malheureusement se soumettre comme Eleanore Dwight ou Kinta.
Kinta se laissait faire, car rien n’avait plus d’importance, elle était désormais spectatrice d’une vie qui défilait sous ses yeux sans que cela ne l’atteigne, glissant vers le monde des esprits.
Viendront ensuite une infirmière et jeune fille convoitée par un autochtone et mariée de force à un veuf. Mais il y a aussi des hommes, un chercheur d’or, un autochtone rebelle et un ancien prêtre vendeur de potions.
Cette terre promise serait donnée aux hommes de foi, ceux qui croient malgré le désastre, les tempêtes, les famines et les attaques sauvages…
Que valait la foi sans épreuve ?
Ils sont tous des personnages forts, incarnés, tragiques. Des hommes et des femmes qui ont rêvé de la terre promise, d’une meilleure vie et se retrouvent confrontés à la dure réalité des choses.
Les territoires
Une terre qui n’est à personne, puis devient à quelqu’un, une terre possédée qui lentement devient possessive : ceux qui y prennent racine ne peuvent plus la quitter.
Terres promises, c’est l’espoir d’une meilleure vie en d’autres lieux. Des territoires convoités, colonisés, violés. Très vite, le lecteur fait la comparaison avec les corps. Surtout les corps de femmes, convoités, souillés et violés.
Gentil Glenn Foster, la fortune se puisait dans la misère des autres, et pas dans la boue glacée de concessions stériles.
L’auteur ne précise aucune indication de lieu ou de temps. Mais les références historiques ou littéraires sont sous-jacentes. On retrouve les grands moments de la ruée vers l’or ou l’épisode des mille femmes blanches données aux Indiens pour mêler les sangs.
Pourtant, même si l’ambiance de western est présente, Bénédicte Dupré La Tour veille à n’utiliser aucun vocable qui s’en approcherait. Car ce roman se veut universel. Comme un rappel du désastre que peut causer les invasions de territoires, de corps ou d’esprits.
Un univers et un style atypiques
Si le thème de ce roman sur la conquête des territoires est universel, intemporel et particulièrement intéressant, le style percute en premier lieu le lecteur. Non seulement, l’auteure propose un genre, le western féminin, assez peu présent dans la littérature française . Mais en plus, elle se démarque par son univers puissant et tragique et son style foisonnant très littéraire.
Une écriture si envoûtante qu’on en oublierait même le message conclusif . Quelque soit la douceur de la terre promise, la nostalgie et la permanence des origines sont toujours en nous et nous façonnent.
Ce premier roman est finaliste de plusieurs prix littéraires ( Prix Hors Convours 2024, Prix Coiffard 2025, Prix L’usage du Monde 2025). Une très belle entrée en littérature pour ce premier roman publié de Bénédicte Dupré La Tour.
Commentaires
Ce formidable roman mérite de remporter des prix littéraires ! (et pas grave s’il n’en remporte pas, nous, on sait ce qu’il vaut)
Le côté western ne m’attire pas. A voir si je peux l’emprunter.
Ce n’est pas l’essentiel. D’ailleurs elle ne parle pas de western. Cela donne juste un registre lexical et une puissance au récit.
Beau retour pour un roman qui le mérite bien !
Merci. Oui c’est une belle découverte. J’aime tomber sur des romans qui se démarquent
ce roman est une très belle découverte!