Titre : Les idéaux
Auteur : Aurélie Filippetti
Éditeur : Fayard
Nombre de pages : 445
Date de parution : août 2018
Aurélie Filippetti, ancienne ministre de la Culture sous la présidence de François Hollande est aussi une écrivain. Pour son troisième roman, elle s’inspire d’une liaison qu’elle a eue avec Frédéric de Saint-Sernin, un homme du gouvernement Raffarin alors qu’elle siégeait à l’Assemblée, pour livrer ses états d’âme sur la vie dans les hautes sphères.
Fille d’un couple d’immigrés d’origine modeste, la narratrice connaît les difficultés du monde ouvrier. Son père est mort d’une maladie d’usine. Elle entre en politique pour défendre ses valeurs et la survie des ouvriers de sa vallée.
« Je sais d’où je viens et pourquoi je suis là. »
Lui aussi avait des idéaux, même si il parvient davantage à s’adapter aux pressions.
« Elle le vit se débattre au cœur de l’arène, agitant des concepts creux et des théories éculées, usées et tellement inefficaces. Elle le regardait d’en haut : s’il avait le verbe clair et la formule marquante, elle s’interrogeait sur son insincérité. Avait-il finalement été peu à peu convaincu par des arguments qu’il avait commencé par répéter comme un élève attentif qui apprend un cours? »
Les meilleurs esprits, une fois au pouvoir doivent souvent perdre leur identité, leurs valeurs pour défendre leur camp, adhérer au discours du chef. Peu avant les nouvelles élections, calomnié, il quittera la politique pour travailler dans une ONG.
Leur liaison doit absolument rester clandestine. Rien ne devait filtrer sous peine de matraquage médiatique et de lynchage.
Car bientôt, c’est à son tour d’entrer au gouvernement. Dix ans que son camp attendait de revenir au pouvoir. Elle a l’angoisse de ne pas être à la hauteur. Lui, conscient de la violence du milieu, craint qu’elle ne se fasse démolir.
« Fais attention. On ne te pardonnera rien. Il faut veiller à tout et ne pas se laisser séduire par ceux qui se servent de l’État plutôt qu’ils ne le servent. »
Et c’est encore plus difficile pour une femme.
« On était dans un pays où l’on bloquait l’ascension d’une femme à la tête d’un grand groupe sous prétexte qu’elle avait un caractère de chien et « une liaison », mais où des hommes qui dirigeait CAC40, médias ou partis politiques confiaient leurs secrets les plus inavouables à des malfrats. »
Aurélie Filippetti décrit ce milieu en le comparant souvent à une monarchie ( le Prince, le Château) avec beaucoup de ressentiment. Ce qui filtre aujourd’hui dans les médias n’est qu’une modeste part de ce qu’elle assène dans ce récit. La politique est sale. La goujaterie des députés à l’assemblée, la manipulation au plus haut niveau par la finance obligeant les candidats à renoncer à leurs valeurs, le bouleversement des codes par la communication via les réseaux sociaux, la dangerosité de la peopolisation.
Les militants se retrouvent abandonnés par ceux qui perdent leurs idéaux sous une illusion de pouvoir.
« Il se passe quoi quand ils mettent les pieds là-haut. »
Après cette lecture, nos maigres espérances envers les politiques sont ruinées. Après une telle confession, je ne pense pas qu’Aurélie Filippetti puisse dignement faire un retour en politique. Fort heureusement, elle a un potentiel en littérature.
Commentaires
Un constata dur. L’auteure ne semble pas mâcher ses mots.
C’est certain. Pourquoi vont-ils tout de même en politique ces personnes qui ne semblent pas faites pour ça. Le naïf espoir de sauver le monde?
Je l’ai souvent trouvée digne, pertinente, cultivée, à la hauteur du ministère qui lui était confié.
Oui mais on le voit encore aujourd’hui, dur de résister à l’acharnement médiatique.
La vie politique n’est pas belle et je le sais. Les maires des petites communes qui n’ont d’autres but que le bien-être de leurs communes en font les frais, eux qui n’ont pas de visées politiciennes; Alors, plus rien ne m’étonne. J’achèterai ce livre pour mon ex-maire de mari
Il va retrouver du vécu!