gobyTitre : Baumes
Auteur : Valentine Goby
Editeur : Actes Sud
Collection : Essences
Nombre de pages : 72
Date de parution : 8 octobre 2014

Auteur :
Valentine Goby est née en 1974. Elle est notamment l’auteur de L’Échappée (Gallimard, 2007), Qui touche à mon corps je le tue (Gallimard, 2008), Des corps en silence (Gallimard, 2010) et Banquises (Albin Michel, 2011). Elle écrit également pour la jeunesse. Kinderzimmer (Actes Sud, 2013) est son huitième roman.

Présentation de l’éditeur :
Je me demande si le père de mon père, que je n’ai pas connu, portait l’odeur d’usine dans toute sa peau et tout son vêtement. S’il rentrait lui aussi imprégné d’essences pures, si sa présence provoquait de semblables, silencieuses apocalypses, pouvait défaire le monde dans lequel il surgissait, en imposer un autre, avec ses propres protocoles, que sa disparition renversait aussitôt et les souris dansaient. S’ils se sont transmis ça, en même temps que le patronyme, le patriarcat, la maison magnifique parmi les oliviers : cette capacité à occuper l’espace, le saturer. Le confisquer.
Valentine Goby aborde ici ouvertement le récit autobiographique. Pour Essences elle revisite son enfance à Grasse, pays des parfumeurs et territoire du père, à travers les odeurs qui ont façonné les premières années de sa vie, de séduction en crises d’asthmes…

Mon avis :
Après ma révélation en lisant Kinderzimmer, je ne pouvais que plonger à nouveau dans l’écriture sensuelle de Valentine Goby. Et cette fois, avec ce récit autobiographique, les sens sont encore davantage en éveil avec le parfum et la musique.
 » Tu existes, intrinsèquement, grâce à ton odeur, tu es quelqu’un. »
Avec un père « Indiana Jones des parfums qui parcourt la planète à la recherche de plantes » et revient de l’usine de Grasse saturé et envahissant d’odeurs, Valentine n’a pas grand chose à apprendre dans le roman de Süskind. Si ce n’est que « l’écriture de Süskind fabrique des parfums« .
Très jeune, elle a voulu exister pour ce père omniprésent et absent, en trouvant son parfum. Son choix se porte sur Paris, Paris d’Yves Saint Laurent. Pas vraiment pour son trop jeune âge, mais elle s’identifie, elle marque son territoire, peut-être en réponse à son père.
 » J’aurais voulu que mon père croie aux fantômes. A mes terreurs. Accepte notre monde aux règles floues, chaque jour réinventées, sans autre point de mire que la joie et l’amour fou, qu’il s’y love un instant pour voir. Me voir. »
C’est l’époque aussi où elle tourne le dos aux cours de piano traditionnels pour découvrir sa musique en toute liberté.
«  comme le parfum, le piano dessine un lieu pour moi, le corps de mes treize ans, qui porte Paris et fatigue ses tendons en morceaux tourmentés et uniques. »
Lorsque, plus tard, à New York elle sera Peau (celle sur qui on teste l’évolution des odeurs) pour une entreprise américaine de parfum, elle se laisse une nouvelle fois dominer par l’odeur des autres.
Puis au Vietnam et aux Philippines, elle découvre les odeurs de nourriture, et en revient purifiée avec son père au chômage qui l’avait enfin rejointe.
De retour à Paris, elle publie son premier livre. « Le roman me signe comme Paris m’a signée à l’adolescence. » Elle adopte alors un autre parfum, Poême, une odeur que son père ne supporte pas mais qu’elle impose comme sa signature.
En tant qu’écrivain, elle lit davantage et découvre dans ses lectures les odeurs des sentiments (odeur d’angoisse, de peur, de chagrin…), une chose qu’elle saura elle-même apprivoiser, me semble-t-il.

Au travers du métier de son père, de l’environnement olfactif de son enfance, Valentine Goby nous offre une belle façon d’évoquer son initiation, avec toujours autant de fluidité et de maîtrise dans son style. Et l’on comprend un peu mieux ses influences avec ces baumes qui sont à la fois une odeur naturelle  et une préparation utile pour cicatriser les plaies.

rentrée bac2014

 

 

 

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

9 octobre 2014 à 10 h 14 min

Non seulement j’avais envie de le lire parce que comme je te disais j’ai rencontré cette femme que j’ai trouvé passionnante, mais en plus le sujet me parle tellement car j’habite à Nice à côté de Grasse et ai été un nombre incalculable de fois visiter les parfumeries et leurs usines, je rêvais d’aller cueillir les roses et le jasmin avec les italiennes qui chantaient tout en cueillant ce nectar odorant…de la poésie sans mots, de la beauté olfactive, visuelle et sensuelle.



9 octobre 2014 à 17 h 12 min

Une très belle critique Jostein. Je vais mettre cet ouvrage dans ma liste d’achat.



9 octobre 2014 à 17 h 49 min

Je n’ai pas encore lu kinderzimmer, en attente bibliothèque. Je note tout de même celui-ci



eimelle
9 octobre 2014 à 18 h 04 min

Kinderzimmer m’a bcp touchée, alors je lirai sans doute celui-là dans quelques temps, pour l’auteure!



9 octobre 2014 à 19 h 42 min

Je suis conquise par ton article, Jviens même de rater mon arrêt de bus…lol



9 octobre 2014 à 20 h 05 min

Ce qu’elle écrit est toujours intéressant.



13 octobre 2014 à 20 h 32 min

J’avais lu Kinderzimmer (terrible et très beau) et tu me donnes sacrément envie de lire celui-ci! Merci!



1 octobre 2017 à 9 h 07 min

Votre avis n’évoque pas ce qui pourrait bien être au coeur de ce petit livre : la déploration du rôle assigné, dans la famille, aux femmes et aux (b)hommes…



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