Titre : Le volontaire
Auteur : Salvatore Scibona
Littérature américaine
Titre original : The volunteer
Traducteur : Eric Chédaille
Editeur : Christian Bourgois
Nombre de pages : 448
Date de parution : 9 janvier 2020

Son premier roman, La fin, a fait partie des finalistes du National Book Award en 2010. Salvatore Scibona propose ici un roman dense, lyrique couvrant trois générations, un roman sur la quête d’identité et les relations filiales, un roman largement plébiscité par la presse américaine. S’inscrivant dans une Amérique marquée par les engagements militaires, les communautés marginales, les désillusions personnelles, ce roman est celui de la perte. Perte d’identité, perte de valeurs, perte de repères.

En 2010, un jeune enfant de cinq ans au langage incompréhensible est trouvé errant seul dans l’aéroport de Hambourg. Baptisé Willy par un prêtre qui devient son seul confident, le jeune garçon sera hébergé dans un foyer pour enfants. Nous, lecteur, savons que son père Elroy Heflin, ancien repris de justice et militaire américain plutôt violent, l’a laissé là dans les toilettes de l’aéroport. A la demande de la mère, une serveuse d’un bar de Riga, Elroy était allé chercher son fils en Lettonie. Pourquoi l’avoir abandonné ?

De retour aux Etats-Unis, Elroy ne dira rien à Tilly, son tuteur légal. De ce constat, l’auteur nous emmène dans le passé de Tilly, alias Le volontaire. Né Vollie Frade, cet homme, engagé plusieurs fois volontairement dans les Marines, a été convoyeur au Vietnam. Cette partie du roman, assez déstabilisante, laisse place à la violence de cette guerre atroce. Mais c’est sur la seconde partie de son engagement que Vollie va perdre son identité. Envoyé secrètement au Cambodge, il sera capturé et enfermé plus d’un an dans un tunnel. A sa libération, Lorch, un étrange personnage lui propose une nouvelle identité contre une mission d’espionnage à New York.

« Je suis une boulette que vous avez commise. Vous voulez m’écarter du paysage jusqu’à ce que je ne puisse plus vous causer le moindre ennui. Moi aussi, je veux dégager

Vollie Frade veut disparaître, oublier ses origines, ses traumatismes de guerre. Il devient Dwight Elliot Tilly. Lorsque sa mission d’espionnage tourne mal, il disparaît vers le Nouveau- Mexique, là où son seul ami avait monté une ferme. Mais il n’y trouve que Louisa et un gamin nommé Elroy. L’endroit était en fait une communauté hippie. Personne ne sait qui est vraiment le père d’Elroy.

Louisa et Tilly se marient, deviennent les tuteurs d’Elroy afin de pouvoir l’inscrire à l’école. Lorsque Tilly rattrapé par son passé s’enfuit, l’enfant sans figure paternelle devient violent. Après un séjour en prison, il s’engage lui aussi dans l’armée.

Ces parcours de vie marqués par la violence d’une Amérique puissante mais engagée à tuer militairement expliquent l’isolement, la marginalisation d’êtres dépourvus de stabilité affective. De génération en génération, les dégâts se transmettent et s’amplifient. Quel avenir Willy peut-il espérer ?

Le volontaire est un roman particulièrement dense, typiquement américain. Les personnages semblent être les marionnettes de l’ambition politique d’un pays. On trouve chez Vollie Frade une espèce d’insouciance, de naïveté au milieu des combats. Un décalage qui intensifie l’absurdité et la violence des guerres. Des guerres qui tuent sur les zones lointaines mais détruisent malicieusement mais sûrement les rescapés.

Malgré les critiques dithyrambiques de la presse américaine auxquelles je reconnais la justesse quant au style et l’ambition de l’écrivain, je me suis parfois perdue dans ce roman. Partir de l’abandon d’un enfant pour remonter sur la perte d’identité, de valeurs pour une certaine jeunesse américaine engagée dans les conflits ou les courants de pensée apocalyptique est un cheminement compréhensible mais tortueux.

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

29 avril 2020 à 10 h 06 min

J’ai remarqué que les romans de littérature américaine sont souvent, pour mon goût, décevants ….. Quels sont les critères d’attribution ? 🙂



29 avril 2020 à 10 h 12 min

Il ne t’a pas convaincu, donc.



franckartbeagmailcom
8 janvier 2023 à 21 h 27 min

La plupart des gens ne disparaissent pas de leur propre vie.
Ils changent plus ou moins.
Ce n’est pas le cas de Vollie Frade, un ancien du Vietnam.
A partir d’un certain moment, l’Histoire l’ayant vidé, il s’absente des restes de lui-même pour devenir non pas vraiment un autre mais un fantôme solitaire.
Texte impressionnant par son ampleur et sa densité.
On traverse plusieurs décennies d’histoire américaine sur trois générations.
L’isolement est-il une fuite, une résistance ou une autre manière d’être au monde?



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