Titre : L’arbre monde
Auteur : Richard Powers
Littérature américaine
Titre original : The overstory
Traducteur : Serge Chauvin
Editeur : Cherche-Midi
Nombre de pages : 550
Date de parution : 6 septembre 2018

«  Personne ne voit les arbres. Nous voyons des fruits, nous voyons des noix, nous voyons du bois, nous voyons de l’ombre. Nous voyons des ornements ou les jolies couleurs de l’automne. Des obstacles qui bloquent la route ou qui obstruent la piste de ski. Des lieux sombres et menaçants qu’il faut défricher. Nous voyons des branches qui risquent de crever notre toit. Nous voyons une poule aux oeufs d’or. Mais les arbres…les arbres sont invisibles. »

Avec ce roman, Richard Powers nous donne à voir et à ressentir les arbres. Il rappelle avec force que l’environnement est vivant, que l’homme dont l’existence représente une minute dans la journée du monde parvient pourtant à détruire la terre boisée pour ses envies de prospérité et qu’il est temps de prendre conscience que pour résoudre le futur, il convient de sauver le passé.

L’homme et l’arbre sont issus du même ancêtre et possèdent encore aujourd’hui des gènes communs. En zoomant sur le passé de chacun des neuf personnages, l’auteur montre que nous sommes forts de nos racines, qu’elles se ramifient dans l’espace. Le roman commence comme un recueil de nouvelles, le temps de faire connaissance avec les personnages et l’importance des arbres dans leur vie.

Nicholas Hoels a des racines irlandaises. Sa famille possède un des rares châtaigniers sauvé d’une maladie qui a décimé toutes les châtaigneraies du sud de l’Amérique.

Mimi est de descendance chinoise. Associée au mûrier et à l’avenir par son père, elle emmène aux Etats-Unis l’héritage d’une lignée avec une bague et un manuscrit ancestral.

Adam est le plus jeune enfant, le plus sensible de la famille Appich. A sa naissance, son père plante un érable. L’arbre reste pour lui un passage entre terre et ciel.

Ray Brinkman est un célèbre avocat. Grâce au théâtre, il rencontre Dorothy. A chaque anniversaire de leur rencontre, ils plantent un arbre. A défaut d’enfant, la nature les sauvera-t-elle du délitement de leur couple?

Douglas Pavlicek a testé la prison, s’est engagé dans l’armée. Il lit de la philosophie à son cheval jusqu’à la découverte de terres dépouillées par les coupes claires. Depuis, il passe ses jours à replanter des sapins de Douglas.

Neelay Mehta est originaire d’Inde. Son père l’initie à l’informatique. Quand tombé d’un chêne, il se retrouve gravement handicapé, il passe ses journées à concevoir un jeu video dans un monde animiste.

Patricia Westerford commence sa vie avec un problème de langage. Protégée par son père, elle vit dans un monde forêt, bercée par les lectures d’Ovide. Très vite, ses découvertes sur la communication entre les arbres la propulse violemment sur la scène mondiale.

Enfin, Olivia Vandergriff est une étudiante en dernière année de science actuarielle. Un expérience de mort imminente l’investit d’un étrange pouvoir. Elle est choisie par des êtres lumière pour sauver les arbres. C’est autour d’elle que vont se réunir une partie des personnages dans le tronc de cette histoire.

«  Le monde comptait six billions d’arbres quand les humains sont apparus. Il en reste la moitié. Dont la moitié encore aura disparu dans cent ans. »

Comme les arbres communiquent dans les airs, Olivia, Nick, Adam, Douglas, et Mimi, militants pour la sauvegarde du patrimoine forestier se retrouvent sur les mêmes champs d’action. Nous les suivrons sur des dizaines d’années allant du sit-in à l’écoterrorisme. 

Pendant ce temps, Neelay s’investit dans le monde virtuel avec des jeux de prophéties sylvestres, Ray et Dorothy se raccrochent aux branches et Patricia revient en force en créant une arche de Noé pour les arbres.

«  Etre humain, c’est confondre une histoire satisfaisante et une histoire pleine de sagesse. Si le monde échoue c’est justement parce qu’aucun roman ne peut rendre le combat pour le monde aussi captivant que les luttes entre quelques humains égarés. »

Richard Powers réussit ce tour de force. L’arbre monde est un roman passionnant qui ouvre les yeux sur l’urgence de réagir contre la déforestation, «  un plus puissant changeur de climat que tous les moyens de transport réunis. »

Les personnages sont investis d’une croyance folle mais «  qu’est-ce qui est le plus fou? Croire qu’il peut y avoir des présences toutes proches dont nous ne savons rien? Ou abattre les derniers séquoias séculaires de la planète pour en faire des planches et des bardeaux? »

Mais des racines, du tronc, de la cime et des graines – titres des différentes parties du livre- l’arbre dans ses immenses variétés, ses innombrables ressources naturelles est le personnage principal de cet immense roman. Le moment le plus poignant n’est-il pas la mort de Mimas, un séquoia géant? 

Un roman ambitieux, passionnant parfaitement construit qui, je l’espère, permettra d’avoir un autre regard sur ces vénérables bienfaiteurs que sont les arbres.

Je remercie Léa et les Editions du Cherche Midi qui m’ont permis de lire ce roman dans le cadre du Picabo River Book Club.

 

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

21 septembre 2018 à 18 h 57 min

Donc toi aussi tu conseilles… je garde dans un coin de ma liste de souhaits, alors.



    22 septembre 2018 à 9 h 45 min

    Oui! Ce n’est pas une lecture facile. C’est un pavé (caché car les pages sont hautes et larges). Le côté Nouvelles au départ est un peu décourageant mais nécessaire. Mais c’est un sujet essentiel fort bien traité



21 septembre 2018 à 22 h 32 min

Moi qui suit entourée de forêts, je devrais aimer ce livre. Je le note





24 septembre 2018 à 13 h 16 min

Son tout premier roman traduit m’était tombé des mains, alors j’hésite beaucoup à lire celui-ci.



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