Titre : La mère des palmiers
Auteur : Nasim Marashi
Littérature iranienne
Titre original : Haras
Traducteur : Julie Duvigneau
Editeur : Zulma
Nombre de pages : 288
Date de parution : 6 février 2025
Le poids de la guerre
Neuf ans après la fin de la guerre Iran Irak, Rassoul prend la route avec son fils Mahziar. Il part vers Dar-ot-Tale’e, un lieu abandonné aux femmes, au-delà des marais. Il espère y retrouver Naval, son épouse.
Ce voyage est aussi l’occasion de suivre ses pensées. Et de souvenir en souvenir, entre présent et passé, le voile se lève sur ce qui a poussé Naval à fuir sa famille.
L’esprit de cette jeune femme a commencé à chavirer quand, à Khorramshahr, en pleine zone de conflit, elle a perdu toute sa famille, sa maison et son fils Chahran. Elle était alors enceinte d’Amal, son second enfant.
Nous, nous sommes maudîtes. Il y a certaines choses qu’on ne doit pas voir. Une femme ne doit pas voir ses enfants morts, sa maison effondrée, sa terre fendue en deux. Si elle voit ça, elle ne doit pas rester.
Naval est revenue des enfers, et elle ne sera plus jamais comme avant. Et cette douleur enfouie rejaillit sur tous ceux qui l’entourent.
Une terre brûlée
La guerre détruit les maisons. Les villages, les palmeraies ne sont plus que cendres. Pour Naval, tout à l’odeur de la mort, de la terre brûlée.
À Ahvaz, où Rassoul a installé sa famille, elle tente pourtant de s’occuper de ses deux filles. Et bientôt elle mettra peut-être au monde un fils. Pourrait-il apaiser le deuil de Chahran ?
Mais quand Rassoul rentre d’un déplacement professionnel au Koweït, il ne reconnaît plus sa femme. Naval est incapable de s’occuper de Mahziar, son nouveau-né.
Nasim Marashi entremêle présent et passé. Avec beaucoup de talent, elle maintient le mystère, ne dévoilant le passé qu’au fil du récit. Ainsi nous errons entre le désespoir de Rassoul et le destin douloureux de Naval.
C’est un homme diminué maintenu en vie par l’amour pour son fils, espérant encore pouvoir reconstruire une famille, qui arrive dans la palmeraie où Naval a trouvé refuge.
Un souffle romanesque et antique
Et cette palmeraie, balayée par les vents, nous offre un décor antique. Les squelettes noircis des arbres évoquent les corps meurtris par la guerre. Là, les femmes portent sur leur visages les stigmates de l’horreur. Même les bufflonnes ne sont plus que des corps atrophiés, estropiés, stériles. C’est un paysage de désolation où pourtant chacun espère une renaissance.
D’une écriture sensible et puissante, Nasim Marashi illustre les conséquences de le guerre sur le vivant. Les hommes sont les premiers touchés. D’ailleurs ils disparaissent du paysage. Ce qui effraie Naval au point de vouloir absolument la naissance d’un garçon. Mais les blessures sont aussi et surtout au cœur des femmes qui ont vu disparaître leurs familles. Et de cette nature dévastée, brûlée, en ruine.
Le pollen avait l’odeur du printemps dans la palmeraie de son oncle. L’odeur de la terre. Du Chatt al-Arab. Du soleil sur les vieilles feuilles de palmiers coupées. De le terre mouillée au soleil. Des bébés dattiers qui ressemblaient à des dattiers adultes en miniature et dont Naval était amoureuse, à qui elle donnait des noms et qu’elle préférait à ses poupées.
Aujourd’hui le pollen avait l’odeur de la mort. Comment peut-on se reconstruire après une telle dévastation ? Est-ce seulement possible ?
Après son premier roman, L’automne est la dernière saison, Nasim Marashi confirme son talent. Je ne manquerai pas de lire ses prochains romans.
Commentaires
L’automne est la dernière saison ne m’avait pas convaincu. Je verrai qi je peux emprunter ce titre.
Je l’ai préféré à L’automne est la dernière saison
Je veux découvrir cette autrice depuis un moment. Je vais devoir choisir entre des deux romans à présent, ton avis faisant pencher pour le 2e.
Oui j’ai préféré le deuxième. D’une part parce qu’il se centre davantage sur une histoire de famille. Et pour son petit côté tragédie antique