Titre : Terre somnambule
Auteur : Mia Couto
Littérature mozambicaine
Titre original : Terra Sonâmbula
Traducteur : Elisabeth Monteiro Rodrigues
Editeur : Métailié
Nombre de pages : 256
Date de parution : 10 janvier 2025
Renaissance d’un chef-d’oeuvre
Paru en 1992, Terre somnambule est considéré comme un des meilleurs romans de littérature africaine du XXe siècle. C’est donc un vrai plaisir de retrouver cette œuvre dans une nouvelle traduction. Et il faut saluer la performance d’Elisabeth Monteiro Rodrigues qui a dû jongler avec le dialecte africain et les mots valises.
Mia Couto nous plonge ici dans la magie africaine, entre légendes et réalité de la guerre, à la frontière du monde des vivants et des esprits. Cependant, malgré l’ambiance de mort, ce récit est un parcours fantastique, réjouissant et surtout empreint d’humanité.
Sur la route
Comme dans le roman de Cormac McCarthy, le récit commence avec la fuite d’un homme et d’un enfant. Ils sont sur une route déserte au milieu de paysages en ruine.
Le vieux Tuahir et le gamin Muidinga se sont enfuis du camp de déplacés.
Ils fuient la guerre, cette guerre qui a contaminé leur terre.
Ils trouvent refuge dans un bus calciné, un machimbombo. Là, après avoir retiré les cadavres, ils s’installent à l’abri. Muidinga trouve dans une valise des vêtements, un peu de nourriture et surtout des cahiers.
L’enfant fait la lecture des cahiers à son oncle Tuahir.
Des récits entremêlés
L’auteur enlace alors deux récits. Celui du vieux Tahir et de Muidinga qui tentent de survivre dans un paysage désert et celui de Kundzu, un jeune garçon qui a fui son village. A la mort de son père, Kundzu se souvient des rêves prémonitoires de l’ancien.
Ces années-là tout avait encore du sens : la raison de ce monde se trouvait dans un autre monde inexplicable. Les anciens faisaient le pont entre ces deux mondes.
Kundzu refuse que professeur et pasteur l’éloignent de sa culture. Alors il quitte alors son village natal à la recherche des soldats ou des esprits.
Parce que cette guerre n’a pas été faite pour vous sortir du pays mais pour sortir le pays de l’intérieur de vous.
Une quête infinie
Nous sommes dans un pays en guerre, un pays tel une baleine échouée que chacun tente de désosser alors qu’il n’est pas encore mort. Tuahir a vu mourir des enfants et il a sauvé Muidinga.
Ce sont des récits de fuite pour sauver leur corps et leur culture. Muidinga, Kundzu mais aussi Farida, une fille marquée par le sort réservé aux jumelles. Recueillie par un couple de portugais, elle sera violée et donnera naissance à un fils. Ce fils disparaît bien vite et Farida n’a plus qu’un objectif, le retrouver avant de mourir. Elle confie cette mission à Kundzu.
ceux qui souffrent le plus dans la guerre sont ceux qui n’ont pas pour office de tuer. Les enfants et les femmes : ce sont eux qui portent le plus de malheur.
Narration et culture
Mia Couto nous entraîne dans des récits palpitants, jubilatoires malgré la toile de fond d’un pays déchiré par la guerre. Le plaisir de lecture tient au style inventif, aux nombreuses péripéties, à l’atmosphère des croyances africaines, au fantastique des légendes et des esprits. Et l’auteur mène sa barque ( pas toujours facile à suivre) jusqu’à un excellent dénouement.
Mais derrière ce rythme foisonnant des aventures de personnages en quête d’altérité, il y a la vérité d’un pays. Une terre couturière de rêves dont certains veulent profiter aux dépens d’une population qui ne possède plus que la peur.
Lu dans le cadre du Bookclub sur Mia Couto ( 15 avril- 15 mai) chez Silence-on-lit
Commentaires
Voilà un auteur que j’aimerais découvrir mais j’appréhende le côté « pas toujours facile à suivre ».
C’est le moment 😉 Il y a un Bookclub jusqu’au 15 mai.
Tu m’intrigues en tout cas 🙂
A lire en octobre pour le mois africain 😉