huongTitre : Sanctuaire du coeur
Auteur : Duong Thu Huong
Editeur : Sabine Wespieser
Nombre de pages : 749
Date de parution : 15 septembre 2011

Auteur :
Duong Thu Huong est née au Vietnam en 1947. Depuis la parution de Terre des oublis en 2006 (Sabine Wespieser éditeur, Grand Prix des lectrices de Elle 2007), elle vit à Paris.

Résumé :
La fugue de Thanh plonge dans la stupeur ses parents, un couple de professeurs respectés, ainsi que toute la petite ville proche de Hanoi où vit cette famille modèle. A seize ans, le jeune homme était promis à un brillant avenir et n’avait jamais donné le moindre signe de trouble ni de rébellion. Quand on le retrouve quatorze ans plus tard – en 1999, le temps du récit -, il est devenu gigolo, entretenu par une femme d’affaires rencontrée dans la maison close de Saigon où il exerçait ses talents de prostitué.
Comment – et pourquoi – ce jeune homme sans histoires en est arrivé là, c’est ce que dévoile ce roman diaboliquement construit. Thanh a tout le temps, pendant ses longues journées dans la villa de la côte que seuls rythment des dîners dans des établissements de luxe, de se remémorer son passé. Ses jeunes années sont autant de souvenirs lumineux : elles ont été à jamais marquées par la présence radieuse de Tra My, son amie de toujours, la petite fille que ses parents avaient recueillie et dont il était tombé éperdument amoureux. Sa descente aux enfers après sa fugue vient en sombre contrepoint de cette enfance heureuse : les scènes époustouflantes de son arrestation par erreur dans un hôtel de passe, de son emprisonnement avec des droit commun ou de sa rencontre avec le proxénète qui l’a embauché donnent à Duong Thu Huong la matière d’un portrait sans appel d’une société vietnamienne déstabilisée et corrompue que dominent le sexe, le pouvoir et l’argent.
Quand Thanh ne supporte plus sa vie oisive d’objet sexuel et qu’il décide de prendre un nouveau départ, il ne peut s’empêcher de buter sur le traumatisme subi lors de ses seize ans. La scène qui le hante, et dont son propre père est l’acteur principal, donne la clé de sa dérive et du roman tout entier. La question sous-jacente que pose en effet Duong Thu Huong tout au long de ce livre consacré aux enfants des hommes et des femmes de sa génération, celle qui s’est battue pour des idéaux et qui ne se reconnaît pas dans le Vietnam d’aujourd’hui, est déchirante : qu’avons-nous fait à nos enfants ? quel monde leur laissons-nous ?

Mon avis :
Quand en 1985, Thanh quitte le domicile familial où il était protégé, adoré, il ne peut que rêver à ce paradis empli des senteurs des pamplemoussiers et des vols amoureux des lucioles.
 » Lui, le jeune Thanh, le fils prodigue, avait voulu cette vie de vagabond mais n’avait pas du tout imaginé à quoi elle
ressemblerait.
 »
Le jeune homme va alors connaître les plus durs combats contre la misère.
Alors âgé de seize ans, Thanh réagit avec fougue et inconscience devant cet outrage qu’il lui est fait. Quoi de plus vexant qu’un amour bafoué, le rejet d’une jeune fille que l’on aime platoniquement depuis toujours. Comment retrouver la confiance et l’amour?
En 1999, alors qu’il est devenu le gigolo d’une femme riche cinquantenaire, Thanh se souvient. C’est l’occasion pour l’auteur de nous plonger dans différentes histoires. Elles s’emboîtent et se succèdent afin de comprendre l’itinéraire du jeune homme. Elles illustrent les injustices sociales et politiques courantes au Vietnam, les vies détruites par les réformes agraires ou la réforme du commerce. Même le fils d’un mandarin, héros de la
Révolution, peut se retrouver acculé et sans ressources.
Drogue, sexe, corruption semblent les maîtres mots des hauts fonctionnaires vietnamiens. Les jolies filles sont violées ou séduites par des hommes parvenus de l’âge de leur père ou leur grand-père, les femmes sont trompées ou battues. Et quelque soit leur destin, l’opinion publique les désigne coupables.
A côté de cette vie misérable, certains font des affaires et dépensent leur argent futilement pour reculer les effets de la vieillesse, comme Kim, la maîtresse de Thanh.
L’auteur juxtapose l’horreur et la misère avec la poésie et le lyrisme. Grâce à son pouvoir d’évocation et ses perceptions sensuelles, l’auteur nous fait profiter des saveurs, des parfums de ce pays. L’évocation des pamplemoussiers, des vergers, de sa maison familiale sont un point d’ancrage pour le jeune homme perdu.
Je me suis attachée au personnage de Thanh parce que son cheminement est logique. Le roman commence avec un jeune enfant protégé, naïf et il grandit au fil de son errance. Il doit se libérer de ce mal qu’on lui a fait mais ce ne sera pas par la souffrance de la vie en prison, ni par la prostitution. Serait-ce par le pardon et le retour aux sources?
C’est un grand roman qui nous emporte au cœur d’un pays riche de ses paysages, ses traditions familiales mais où il peut être difficile de vivre. Duong Thu Huong, grâce à son talent de conteuse, nous emporte dans  cette vibrante histoire d’enfant prodigue abandonné.
J’avais lu et apprécié Terre des Oublis et Itinéraires d’enfance du même auteur. J’avais toutefois eu plus de
difficulté à lire Au zénith. J’ai retrouvé ici, un grand roman humain et empli d’émotions.

 

 

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

26 octobre 2013 à 10 h 08 min

Je ne connais pas tout, mais ton article me donne envie de me laisser tenter !



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