Titre : Les certitudes du doute
Auteur : Goliarda Sapienza
Littérature italienne
Titre original : Le certezze del dubbio
Traducteur : Nathalie Castagné
Éditeur : Le Tripode
Nombre de pages : 230
Date de parution : 26 mars 2015
Auteur :
Goliarda Sapienza (1924-1996) est née à Catane dans une famille socialiste anarchiste. Son père, avocat syndicaliste, fut l’animateur du socialisme sicilien jusqu’à l’avènement du fascisme. Sa mère, Maria Giudice, figure historique de la gauche italienne, dirigea un temps le journal Il grido del popolo (Le Cri du peuple).
Tenue à l’écart des écoles, Goliarda reçoit pendant son enfance une éducation originale, qui lui donne très tôt accès aux grands textes philosophiques, littéraires et révolutionnaires, mais aussi à la vie populaire de sa ville natale. Durant la guerre, à seize ans, elle obtient une bourse d’étude et entre à l’Académie d’art dramatique de Rome. C’est le début d’une vie tumultueuse. Elle connaît d’abord le succès au théâtre avant de tout abandonner pour se consacrer à l’écriture. S’ensuivent des décennies de recherches, de doutes, d’amours intenses. Mais son œuvre complexe et flamboyante laisse les éditeurs italiens perplexes et c’est dans l’anonymat que Goliarda Sapienza meurt en 1996. Elle ne trouve la reconnaissance qu’après sa mort, avec le succès en 2005 de la traduction en France du roman L’Art de la joie. Les éditions Le Tripode entreprennent désormais la publication de ses œuvres complètes.
Présentation de l’éditeur :
Rome, milieu des années 1980. Goliarda Sapienza rencontre par hasard une ancienne co-détenue de la prison de Rebibbia. Entre l’écrivaine désormais âgée et Roberta, militante politique radicale et Lolita faussement ingénue, se cristallise des sentiments confus. Goliarda va nouer avec la jeune fille une relation passionnelle, quasi amoureuse, et retrouver à travers elle l’exaltation qu’elle avait connue durant sa détention. Ensemble, elles vont parcourir une ville – Rome – prise entre le poids de son histoire et la désolation de la modernité marchande.
Les Certitudes du doute dévoile aux lecteurs une nouvelle facette de Goliarda Sapienza, celle d’une femme éprise, qui fait des rues et des sous-sols romains le théâtre de ses émotions. Après Moi, Jean Gabin, qui narrait son enfance en Sicile, et L’Université de Rebbibia, récit de son séjour carcéral dans la prison de Rome, ce nouveau récit clôt le cycle autobiographique que Goliarda Sapienza avait intitulé Autobiographie des contradictions.
Mon avis :
Ma lecture tant appréciée de L’Université de Rebbibia est un peu trop ancienne pour renouer facilement avec les amitiés carcérales de Goliarda.
Deux ans après un vol de bijoux, Goliarda est arrêtée et envoyée à la prison de femmes de Rebbibia, une volonté d’écrivain de plonger dans ce monde marginal. Elle y noue des amitiés inoubliables.
Dans ce texte autobiographique, Goliarda évoque ses retrouvailles avec Roberta dans le Rome des années 80.
Le titre affirme que nous sommes dans le cycle de l’autobiographie des contradictions et le fond confirme cette ambiance.
Attirance et méfiance, violence et tendresse, liberté et regret de l’univers carcéral, jeunesse et vieillesse, droit commun et politique. Toutes les relations entre les deux femmes soufflent le froid et le chaud avec toutefois une amitié inaltérable qui lie tous ceux qui ont connu la prison.
Goliarda s’interroge sur ses sentiments. « Est-ce qu’être attaché à quelqu’un qui vous est si profondément nécessaire ne rentrerait pas dans les catégories de l’amour? »
Qu’est-ce qui l’attire vers Roberta? L’attirance de la jeunesse pour cette gamine de vingt quatre ans qui pourrait être la fille qu’elle n’a jamais pu avoir. Cette sensation que Roberta est sa lune noire, sa jumelle, une autre si semblable à elle-même. Ce regret nostalgique de l’univers carcéral où le temps et les frontières n’existent plus.
» Parce qu’elle y a grandi, dans la réclusion, sur ce damier sans fin d’heures coupées jusqu’à l’insupportable en minutes et secondes, et peut-être en quelques mesures temporelles qui nous sont encore plus imperceptibles, à nous gens du dehors. Roberta a été élevée en prison – depuis qu’elle y est entrée pour la première fois à quatorze ans- comme vous qui lisez avez été élevés chez les sœurs ou à l’école publique ou dans quelque collège huppé d’au-delà des Alpes. »
Roberta est un être insaisissable qui peut passer de la violence aux larmes, opportuniste et dévouée à ses amis de prison. Elle perçoit les hésitations de Goliarda et la guide vers la Rome débauchée qui semble toujours la fasciner, elle la sicilienne rebelle.
Ce récit est beaucoup moins romanesque que L’université de Rebbibia ( pourtant autobiographique lui aussi) mais il met en évidence la dualité du personnage de l’auteur, sa fragilité. Lorsque Roberta qui pense que l’écriture est une chose personnelle et sacrée demande à Goliarda pourquoi elle écrit…
» Oh, pour deux raisons seulement! Pour me défoncer -exactement comme pour toi l’héroïne- cela seul me fait vivre pleinement la vie. Pour moi, ce que nous appelons vie ne prend de la consistance que si j’arrive à la traduire en écriture….la seconde est une conséquence de la première: raconter aux autres – je ne crois pas qu’on écrive pour soi-même – les visages, les personnes que j’ai aimées et ainsi, je sais que ça peut paraître sentimental et naïf mais je m’en fous, et ainsi-disais-je- prolonger de quelques instants leur existence et peut- être la mienne. »
Avec Les certitudes du doute, Goliarda prolonge quelques instants la vie des personnes qu’elle aime et trace cette manie de se parler à elle- même pour donner une vie à sa part de joie.
Commentaires
Tu as été plus persévérante que moi, je n’ai pas réussi à entrer dans ce récit alors que j’avais beaucoup aimé Moi, Jean Gabin et L’université de Rebbibia.
Oui, rien à voir avec l’engouement pour L’université de Rebbibia ou L’art de la joie.
je continuerai sans doute dans quelques temps ma découverte de cette auteure!
Juste l’Art de la joie pour l’instant, mais j’aimerais bien poursuivre mes découvertes.
Je te conseille L’université de Rebbibia, mon second préféré après L’art de la joie
L’art de la joie est encore sur mes étagères. Beaucoup apprécié l’université de Rebbibia et Moi, Jean Gabin. Un livre à noter
C’est tout de même un petit pavé L’art de la joie mais tu devrais aimer.
Je connais un peu l’Art de la joie mais pas ce titre… Pourquoi pas?