Titre : L’échelle de Jacob
Auteur : Ludmila Oulitskaïa 
Littérature russe
Titre original : Yacob’s ladder
Traducteur : Sophie Benech
Editeur : Gallimard
Nombre de pages : 624
Date de parution : 10 mars 2018

 

Deux femmes passionnées

Comme elles se ressemblent ces deux femmes d’une même lignée. A tel point que je me perdais parfois dans ce tissage des destins.
Maroussia est née à Kiev en 1890, d’un père suisse et d’une mère juive. Elle a été sauvée des pogroms par une voisine. Une cliente de son père la prend comme assistante d’éducation. Passionnée de musique, elle rencontre Jacob Ossetski lors d’un concert de Rachmaninov. Fils d’un riche industriel, Jacob est surtout intéressé par la musique, la littérature. Leur couple repose sur cet échange d’idées. Mais Jacob passera trente années en relégation, interdit de domicile à Moscou.

Un mari et une femme doivent vivre ensemble, un mariage ne peut pas reposer sur des timbres-poste.

Nora, la petite-fille de Maroussia découvre la correspondance de sa grand-mère qui vient de mourir, et de Jacob dans une malle de son appartement communautaire. Elle aussi est une femme libre, intellectuelle. A trente-deux ans, elle est scénographe et mère de Yourik. Si elle a fait cet enfant avec Vitia, un jeune autiste, elle vit une histoire d’amour avec Tenguiz, un metteur en scène marié. Ils se voient lorsque Tenguiz la rejoint pour monter une pièce de théâtre. Puis ils s’éloignent parfois pendant des années.

L’indépendance de Tenguiz et le non-conformisme de Nora étaient sans doute à l’origine du respect et de l’attirance qu’ils éprouvaient l’un pour l’autre.

Un siècle d’histoire

En alternant les histoires de Maroussia et de Nora, Ludmila Oulitskaïa balaie un siècle d’histoire russe. Passion, mort, prison, destin, pas de doute, nous sommes dans un grand roman russe.
En filigrane de ces grands destins, l’histoire politique russe apparaît. Jacob nous rappelle combien de savants, d’artistes, de poètes, d’intellectuels ont été enfermés dans les camps, les goulags.
Nora, en envoyant Yourik aux Etats-Unis chez son père juste avant son recensement pour le service militaire illustre combien les mères craignent les opérations militaires incessantes qui sacrifient la jeunesse du pays.
Avec ses origines juives, Nora nous transporte aussi vers cette échelle de Jacob, symbole du lien entre le Ciel et la Terre.

Dieu a béni tous les hommes à travers les Juifs.

Un roman foisonnant

Lorsqu’un livre commence avec un arbre généalogique, le lecteur se doute qu’il va embrasser une complexe saga familiale. Si il y a de nombreux personnages, le récit se concentre sur quelques uns. Mais l’auteur ne se prive pas de nous embarquer dans des dialogues scientifiques ou spirituels entre Vitia et son ami Gricha, de nous parler des histoires des couples des parents de Nora, des projets de mises en scène de Tenguiz ou de la vie de Jacob dans les différents camps. Ce qui donne un roman tentaculaire d’une grande richesse mais aussi d’une vraie complexité.

L’histoire d’un grand amour, l’histoire d’une quête de sens, une vie remplie de créativité, et une passion incroyable pour la connaissance, le désir de comprendre un monde échevelé et aberrant.

Avec cette lecture, je découvre l’univers de Ludmila Oulitskaïa, considérée comme l’une des plus grandes auteures russes contemporaines. Je ne suis pas contre un conseil pour un autre roman essentiel à lire de cette auteure.

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

12 avril 2024 à 14 h 05 min

Tu as pu te repérer facilement dans cette famille ? C’est ce que je crains toujours un peu dans ce genre de roman.



    12 avril 2024 à 15 h 55 min

    Oui je ne suis même jamais allée consulter l’arbre généalogique. Par contre, il est possible de mélanger certains détails mineurs de la vie de Maroussia et de Nora tant elles sont proches dans leur façon de vivre. Et qu’on alterne allègrement les chapitres consacrés à l’une et à l’autre.



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