Titre : Comme nous existons
Auteur : Kaoutar Harchi
Editions : Actes sud
Nombre de pages : 140
Date de parution : août 2021

 

Un récit autobiographique

Le récit intime de Kaoutar Harchi commence par un souvenir. Hania et Mohamed, ses parents, regardent avec bonheur la video de leur mariage. Une scène de joie à Casa en 1984.

Mes parents, une fois, furent jeunes, insouciants, et je l’ignorais.

Le père d’Hania, couturier est venu en France en 1960 comme travailleur immigré. En 1970, il fait venir sa femme et ses enfants à Belfort.
Hania rencontre Mohamed, commerçant ambulant sur Paris, à Casablanca en 1983. Le couple s’installe dans les immeubles du faubourg de l’Elsau. Le couple travaille dur  pour donner un avenir à leur enfant.
Hania tient absolument à mettre sa fille dans une école hors des cités.

Telle était son expérience de mère arabe, dans ce pays. Une expérience de la peur, et cela d’autant plus fortement à l’approche de moments où une décision relative à mon avenir devait être prise.

Lors de son parcours scolaire, la jeune fille fait l’expérience du racisme, de l’assignation. Elle va souffrir des petites violences qui s’exercent dans cette institution. Ce lieu n’est pas la seconde famille que sa mère voulait pour elle.
Plus tard, orientée vers des études de sociologie, elle découvre l’oeuvre d’Abdelmalek Sayad et notamment son livre, La double absence. Des illusions de l’émigré aux souffrances de l’immigré. Une clé pour comprendre la vie de ses parents et la sienne.

Le miroir d’une communauté

Ce récit est à la fois intime et universel. Il offre une vision politique et critique de l’univers post-colonial. Nous suivons Kaoutar des années 90 à 2010. Une période marquée par la loi sur l’interdiction du voile dans les écoles en 2004 et la mort de deux adolescents, Zyed Benna et Bouna Traoré en octobre 2005 à Clichy-sous-bois. Sans oublier la mort d’Ahmed, un jeune garçon d’un immeuble voisin.

Nous fûmes dépouillés de nous-mêmes par la violence. La violence nous contraignit à nous regarder et à regarder notre vie autrement. Parfois, nous ne voyions plus rien, sauf la violence elle-même. La violence, alors, cessa d’être un mot : elle devint une chose, une expérience, une forme de vie.

En faisant des études de sociologie, l’auteur a l’impression de trahir ses parents. Comme Annie Ernaux, l’éducation la sort d’un monde qu’elle veut pourtant venger.

Je croyais que cela en valait la peine, que l’écriture ne ferait de mal à personne, qu’elle ne m’enlèverait pas mes parents, qu’au contraire l’écriture me les rendrait plus encore par le renforcement du lien intime qui nous unissait. Je me convainquais que la peine ressentie, née de l’effort d’écrire, serait bientôt balayée par ce formidable sentiment de revanche, et même de vengeance – venger ma race – que l’acte d’écrire me permettrait d’accomplir.

En ce moment, où la violence des rues est encore bien présente. Et où l’on accuse parfois rapidement l’éducation des mères. J’ai aimé le discours de Nora.

Ils nous accusent, nous les mères, ils disent que nous ne nous faisons pas obéir de nos enfants. C’est ce que disent les assistantes sociales, les enseignants, les médecins, les juges, les policiers : surveillez-les, ne démissionnez pas, aidez-nous à vous aider. Mais il ne faut pas les croire. Nous sommes de bonnes mères. Nous sommes les uniques mères de nos enfants.

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

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