Kamal Jha

Titre : Elle lui bâtira une ville
Auteur : Raj Kamal Jha
Lettres Indiennes
Titre original : She will build him a city
Traducteur : Eric Auzoux
Editeur : Actes Sud
Nombre de pages : 416
Date de parution : 5 octobre 2016

 

Dans ce roman énigmatique et subjuguant, Raj Sharma Jha tisse les histoires de trois personnages principaux appelés Homme, Femme et Enfant.
Homme est un jeune homme, fils d’un homme simple, devenu riche en sélectionnant des projets immobiliers pour les banques. Il habite un 2000 mètres carrés à Appartment Complex à proximité du Mall, le plus grand centre commercial de l’Inde au coeur de New City. Dans le métro, dans sa voiture avec chauffeur sur les seize voies d’autoroute menant au Mall, il observe et s’évade souvent dans des délires macabres, des idées de viol ou de meurtre, des ballades irréelles à Paris, Singapour où habitent ses meilleurs amis ou dans les nuages. Un jour, il emmène chez lui une femme et sa fille qui tient un ballon rouge pour une nuit, le temps qu’elles se douchent, mangent et se reposent. Un ballon rouge qui devient un témoin, un lien entre deux mondes, la réalité et l’imaginaire, le luxe et la pauvreté. Homme vit dans le royaume de l’argent où tous les délires sont possibles, où chacun sera son obligé pour quelques roupies.

Femme est un mère vieillissante, perturbée par le retour de sa fille qui cherche un asile où on ne lui demandera rien. Que lui est-il arrivé pour qu’elle soit si triste et fatiguée? Elle qui, toute petite remerciait sa mère d’être toujours là pour elle et voulait qu’une dame de quatre mètres puisse à son tour câliner la mère. Jusqu’au jour, où le père décède. La fille l’attend, le voit depuis la fenêtre comme un fantôme qui veille sur elles. Elle ne supporte pas que sa mère ait une histoire d’amour avec un ancien étudiant de son père. A dix-neuf ans, elle fugue.

Enfant est un bébé abandonné sur le seuil de l’orphelinat Little House, sous le seul regard d’une chienne Bhow. Le directeur n’en revient pas, un garçon en bonne santé abandonné. Il n’y avait alors qu’un seul garçon trisomique dans cet orphelinat. Kalyani, une infirmière de vingt quatre ans dont toute la famille vit dans un bidonville s’en occupe avec amour jusqu’au jour où elle doit quitter Little House et où le bébé disparaît lors de l’effondrement d’un mur suite à un orage.
Bhow le conduira auprès de Violets Rose, une vieille dame qui hante le cinéma Europa du Mall depuis que les investisseurs ont annexé les terres de ses parents pour construire New City.

L’auteur développe les trois histoires qui semblent ne jamais se rejoindre. Il nous perd dans le mystère, la poésie, le rêve, les hallucinations sans jamais nous lâcher vraiment. Car la réalité de la vie de cette grand ville indienne est bien là avec le côtoiement du luxe incroyable et des bidonvilles. Près du Mall, de l’hôtel de luxe, juste au-delà du pont de l’autoroute, il y a un autre monde, celui des mendiants, handicapés, sdf.

Avec les vies de ses trois personnages principaux mais aussi d’autres personnages riches ou pauvres qui les croisent, Raj Kamal Jha dresse une photographie glaçante de la société indienne où les pauvres et les riches vivent côte à côte.
D’un côté, c’est la privation d’eau et d’électricité, des salaires de misère pour des travaux difficiles, des viols, le handicap, la maladie, mais on n’y pleure pas sauf si quelqu’un regarde. De l’autre, des voitures avec chauffeur, des suites de luxe, des plaisirs aussitôt satisfaits.

J’ai suivi l’auteur avec beaucoup d’intérêt et d’attente dans cette ambiance étrange ( j’ai parfois pense aux romans de Murakami) où le mouvement peut s’arrêter, où l’un entre dans une scène de cinéma, où un ballon vous emmène côtoyer les avions mais où la réalité fait vite redescendre le lecteur sur cette terre difficile pour les déclassés.
Je ne serais peut-être pas allée naturellement vers ce genre de roman sans mon intérêt pour la littérature indienne. Et j’aurais raté une lecture qui se démarque largement dans mon programme de rentrée. Le ballon rouge m’a moi aussi transportée dans un univers inhabituel pour un étonnant voyage.

rl2016 Lire-le-monde-300x413

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

15 octobre 2016 à 10 h 01 min

J’ai parfois du mal avec ces romans qui changent d’ambiance en cours de route mi imaginaire mi réaliste car ça me déstabilise et j’ai l’impression de me perdre. Néanmoins tu en parles si bien qu’à mon tour j’ai envie de me pencher vers cette littérature indienne que je connais très mal.



15 octobre 2016 à 22 h 32 min

Une mauvaise première fois, peut-être une bonne façn de renouer avec la littérature indienne. Si je le trouve à la bibli….



18 octobre 2016 à 9 h 04 min

Ca a l’air assez étrange, mais pourquoi pas;



Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *