Titre : Les raisons de mon crime
Auteur : Nathalie Kuperman
Editeur : Gallimard
Nombre de pages : 240
Date de parution : janvier 2012
Auteur :
Nathalie Kuperman est née en 1963. Elle vit à Paris où elle écrit des romans, des livres pour enfants et adolescents, ainsi que des scénarios de bandes dessinées ou de pièces radiophoniques. Les raisons de mon crime est son septième roman.
Présentation de l’éditeur :
« Elle n’avait pas eu une vie facile. Elle passait les détails, mais ce qu’il fallait qu’il sache, et puisque ça lui viendrait aux oreilles un jour ou l’autre elle devait le lui dire, c’est que les quatre hommes qu’elle avait aimés depuis son divorce étaient morts. Maurice faillit s’étrangler.
Ils sont morts de quoi ?
De mort naturelle, pardi !
Et ce fut elle qui s’étrangla de rire. Maurice la regardait, de plus en plus fasciné. Cette femme était exactement la femme
dont il rêvait.
Bon, maintenant que tu sais, tu restes ?
Tu veux bien de moi ?
Et comment !
Ils se tapèrent dans la main comme pour conclure une bonne affaire (et Maurice n’osait croire qu’il venait de croiser
l’amour une seconde fois, de façon si brutale, si forte, si rapide). »
En retrouvant des années plus tard une cousine perdue de vue, la narratrice se trouve plongée dans un univers qui l effraie et la fascine jusqu au vertige. Les personnages de ce nouveau roman de Nathalie Kuperman sont impressionnants de brutalité, presque de sauvagerie, et pourtant bouleversants de franchise, d humanité blessée.
Mon avis :
À l’occasion de l’enterrement de sa tante, Marianne retrouve sa cousine Martine. Autrefois, elle passait ses vacances chez sa grand-mère et elle vouait une profonde admiration pour sa cousine, son aînée de quatre ans, belle gracieuse et admirée de tous les garçons. Un bon souvenir pourtant teinté de peur car la
grand-mère et la mère de Martine pouvaient être dures lorsqu’elles étaient sous l’emprise de l’alcool.
Les deux cousines se sont perdues de vue, car la mère de Marianne voulait rompre avec cette étrange famille. Marianne a réussi sa vie en tant que graphiste mais à plus de quarante ans elle se retrouve au chômage et seule avec sa fille Fanny.
Lorsque Martine appelle Marianne, après l’avoir vu au Soir 3, les deux cousines décident de se revoir et Marianne souhaite écrire un livre sur sa cousine. Elle tente à la fois de découvrir son passé et de comprendre la déchéance de Martine. Elle est aujourd’hui déformée par l’alcool, handicapée suite aux chutes et aux violences conjugales, elle vit dans un appartement de 15 mètres carrés avec Lucien, un chômeur paumé. Mais tous deux ne regardent pas à la dépense pour accueillir Marianne avec chaleur.
L’auteur par le biais de sa narratrice plonge dans l’horreur crue de la misère, faisant peut-être un amalgame rapide entre alcool, violence, chômage, handicap et front national. J’ai trouvé que Marianne se faisait un peu voyeuse en plongeant dans l’intimité de sa cousine. Car elle veut comprendre comment on en arrive
à boire si tôt le matin, à accepter ce type de vie, comment la mère de Martine a pu être veuve sept fois, comment on s’inscrit irrémédiablement dans cette misère physique et mentale?
Marianne va jusqu’à boire elle aussi de bonnes bouteilles de vin rouge chaque soir pour mieux comprendre sa cousine, pour oublier le chômage et la solitude, ou pour rompre le lien avec sa mère décédée d’un cancer depuis peu.
« Elles avaient les mêmes parents, les mêmes références, la même éducation. Qu’est-ce qui fait que l’une sombra et l’autre
pas? »
Nathalie Kuperman décrit le milieu avec âpreté et tendresse à la fois. Par exemple, le récit de la fin de vie
de la mère de Martine est à la fois touchant et désespérant. À la fin du livre, je suis restée avec un double sentiment de malaise et de compassion, ce qui me semble la preuve d’une bonne construction et d’un style qui laisse passer les émotions.