Titre : Les confluents
Auteur : Anne-Lise Avril
Éditeur : Julliard
Nombre de pages : 208
Date de parution : 19 août 2021

 

Deux citoyens du monde

Si le roman s’ouvre en 2040 sur une île indonésienne avec Jaya et Aslam en lutte contre la montée des eaux, c’est surtout Liouba et Talal que nous allons suivre aux quatre coins du monde.
Liouba est née à Moscou et y a vécu jusqu’à sept ans. Lors de ses études à Paris, elle apprend l’assassinat de ses parents retournés vivre en Russie. Seule au monde, elle vit à Paris. En 2009, Liouba est en Jordanie pour son premier reportage. Elle s’intéresse à une opération de plantations d’arbres dans le désert.

J’aimerais raconter comment les hommes vivent avec leur écosystème, s’y adaptent et sont marqués par lui.

De retour du désert, dans un café d’Aqaba, elle rencontre Talal Sariel, un journaliste photographe de Berlin qui travaille sur les mouvements de population dans les zones de guerre. Français par son père et turc par sa mère, il a grandi avec son grand-père sur une île proche d’Istanbul.

L’exil est l’état naturel de l’être humain. Né dans un lieu de hasard, appelé à ne jamais y demeurer, appelé à toujours y être ramené.

Un monde à la dérive

Désormais, Liouba écrit sur des sujets environnementaux pour le magazine Terre d’exil. Elle s’intéresse notamment aux forêts. Ses reportages nous emmène en Guinée, dans la forêt boréale russe en Tanzanie. Lui nous entraîne dans les camps de réfugiés en Turquie. Ce sont toujours de superbes passages à la rencontre des habitants engagés pour la défense de leur environnement.  Anne-Lise Avril décrit avec précision ce qui se passe sur le terrain. C’est à la fois d’une grande richesse documentaire et d’une profonde humanité. Quelques échappées en 2040 nous montrent que la planète n’en finit pas d’agoniser mais que toujours quelques uns tentent de ralentir le processus, notamment en étendant des draps blancs géants sur la banquise au Groenland.

Le port d’Arkhangelsk est l’une des portes d’entrée de ce que les Chinois appellent désormais la route de la soie polaire…
Nos économies bénéficient directement de la fonte des glaces. C’est scandaleux.

En jumeaux cosmiques, Liouba et Talal vivent les mêmes choses en des endroits différents. A Dvinsky, dernier bastion de la forêt primaire russe attaquée par des exploitants industriels ou à Alep pendant les bombardements, Liouba avec les activistes et Talal  avec la population, côtoient la violence et la mort.

 

Itinérants et toujours ramenés vers leur rivage

Malgré une profonde attirance, les deux nomades ne font que se croiser au gré de leurs reportages.

Ils étaient deux membres d’une nation d’observateurs qui parcouraient la planète, inlassablement, pour en traquer les failles, pour en saisir les conflits, pour en enregistrer l’écho et s’en faire les porte-voix.

En exil permanent, il y a pourtant un mouvement perpétuel qui les ramène soit vers leur lieu de naissance, soit l’un vers l’autre. Comme un point fixe dans leur errance perpétuelle.

Un fragile équilibre

Ce premier roman oscille entre un documentaire sur un monde en danger et le récit d’une passion entre deux journalistes globe-trotters. L’auteur est passionnante lorsqu’elle nous entraîne aux quatre coins du monde, nous laissant découvrir des chantiers prometteurs pour la défense de l’environnement. Même à Alep, elle parvient à faire ressortir un enseignement sur la fabrique du savon. Les rencontres humaines, les passions et les savoir-faire sont des réelles lueurs d’optimisme dans un monde qui reste violent avec les attaques des entreprises et des états assoiffés de profit. Bien évidemment, les lieux où elle nous transporte sont magiques. Et ses descriptions de paysage, enrichies de couleurs, de lumière, sont remarquables. A la limite du trop lyrique parfois. Et c’est un peu l’écueil de ce premier roman.
Souvent j’ai craint de tomber dans la romance entre Liouba et Talal. On la frôle. On l’évite, relancé sur la piste de Jaya et Aslam, qu’on pourrait parfois oublier ou en repartant sur une opération de terrain particulièrement intéressante. Mais il faut bien trouver une issue à cet amour empêché. Alors on y revient quitte à décevoir ceux qui voulaient reconquérir le monde.

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

27 août 2021 à 10 h 49 min

J’en profite pour vous remercier d’une part pour vos articles qui attirent l’attention sur des livres que nous n’aurions pas nécessairement vus, et d’autre part pour ce très beau texte d’Isabel Guterriez « Ubasute » que j’ai commencé après avoir lu votre recommandation très enthousiaste. C’est un bijou !!!!!!
Très bonne journée 😃😃😃



29 août 2021 à 10 h 21 min

Pas tentée, mais tu as apprécié.



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