Titre : Lëd
Auteur : Caryl Ferey
Editeur : Les Arènes
Nombre de pages :528
Date de parution : 14 janvier 2021

 

Norilsk

Norilsk, une ville minière située en Sibérie est le principal personnage de ce roman. Une seule route, des immeubles délabrés, une terre peuplée de quelques autochtones survivants et leurs troupeaux de rennes, un endroit où rôdent les loups et les exclus du continent russe. Un enfer de glace balayé par les ouragans. Les températures en hiver descendent à -60°C pour flirter avec les -15°C lors des deux mois de printemps. Une ville polluée par la mine de nickel et les essais nucléaires.

Vivre à Norilsk, c’était évoluer dans une prison géante avec la menace constante d’une interdiction, un univers panoptique rappelant à qui pouvait l’oublier qu’ici il valait mieux rester à sa place.

Caryl Ferey y a séjourné. Il y a puisé ce décor idéal pour un roman noir et la tendresse de certains de ses personnages.

Un roman choral

Gleb Berensky, mineur et photographe amateur, prend des clichés quand l’ouragan emporte le toit du gostinka ( foyer de travailleurs) où vit Dasha, une jeune costumière, sensible et originale. Avec Shakir, un chauffeur de taxi, ancien soldat des forces spéciales traumatisé par les guerres d’Afghanistan et de Tchétchénie, Dasha et Gleb découvrent le corps d’un autochtone sous les décombres du gostinka. Qui est-il? Que faisait son corps sur le toit?
Boris Ivanov, un flic honnête muté dans l’enfer de Norilsk suite à la mise en cause d’un colonel corrompu lors d’une affaire à Irkoutsk,  enquête sur l’identité du cadavre. Lena, une médecin légiste oubliée de sa hiérarchie lui apporte une aide considérable.
L’enquête patine jusqu’à la découverte du corps de Valentina, en-fiancée de Gleb. La blogueuse qui dénonce les risques écologiques de l’industrie minière connaissait le Nenets (éleveur de rennes) retrouvé mort quelques jour plus tôt. Quel est le lien entre ces deux crimes?

Un clan amical

Malgré l’environnement glacial, il existe des liens chaleureux entre les différents personnages. Les liens familiaux, amoureux ou amicaux soudent ce petit monde qui aime se retrouver dans les bars. Boris, Sacha, Gleb ou Nikita sont l’archétype de l’homme russe. Des géants corpulents et bravaches tendres et attentionnés avec leurs compagnes et compagnon.
Nikita nous livre sa poésie et son amour fougueux pour Gleb. Boris est prêt à tout pour offrir une place en sanatorium pour sa femme.
Dasha colore le paysage de ses cheveux bleus et de ses vêtements originaux mais elle nous attendrit avec son amour secret pour Gleb ou les recherches sur le passé de sa grand-mère, ancienne prisonnière de goulag.
Caryl Ferey a le sens de la narration, mêlant les frissons d’une histoire macabre à la chaleur des relations humaines.

La Russie en toile de fond

Chaque personnage est ancré dans son passé, le passé mouvementé d’une Russie qui ne se remet pas de la chute du mur. Et chacun met en évidence une problématique de la société russe.
Homophobie, corruption, pollution, extinction des autochtones, violences dans les conflits en Tchétchénie, pouvoir de l’église orthodoxe, ultra nationalisme.
Une toile de fond qui entre en résonance avec l’actualité du conflit entre l’Ukraine et la Russie. Les romans de Caryl Ferey sont prenants et toujours bien documentés.

Lecture commune avec Vanessa, retrouvez son avis sur son blog, Le jardin de Natiora.

 

 

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

20 juillet 2022 à 11 h 21 min

Ta chronique est parfaite. J’y retrouve tout ce que j’ai trouvé et aimé dans ce roman. Merci beaucoup de m’avoir proposé cette lecture commune !



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