josseTitre : Le dernier gardien d’Ellis Island
Auteur : Gaëlle Josse
Éditeur : Notabilia
Nombre de pages : 176
Date de parution : 4 septembre 2014

Auteur (source Éditeur ):
Venue à l’écriture par la poésie, Gaëlle Josse publie son premier roman Les heures silencieuses en 2011 aux éditions Autrement, suivi de Nos vies désaccordées en 2012 et de Noces de neige en 2013. Également parus en édition de poche, ces trois titres ont remporté plusieurs prix, dont le Prix Alain-Fournier en 2013 pour Nos vies désaccordées. Ils sont étudiés dans de nombreux lycées et collèges, où Gaëlle Josse est régulièrement invitée à intervenir. Le roman Les Heures silencieuses a été traduit en plusieurs langues et Noces de neige fait l’objet d’un projet d’adaptation au cinéma.
Gaëlle Josse est diplômée en droit, en journalisme et en psychologie clinique. Après quelques années passées en Nouvelle-Calédonie, elle travaille à Paris et vit en région parisienne.
Elle anime, par ailleurs, des rencontres autour de l’écoute d’œuvres musicales et des ateliers d’écriture auprès d’adolescents ou d’adultes.
Le dernier gardien d’Ellis Island est son quatrième roman, et le premier publié par Notabilia

Présentation de l’éditeur :
New York, 3 novembre 1954. Dans quelques jours, le centre d’immigration d’Ellis Island va fermer. John Mitchell, son directeur, reste seul dans ce lieu déserté, remonte le cours de sa vie en écrivant dans un journal les souvenirs qui le hantent : Liz, l’épouse aimée, et Nella, l’immigrante sarde porteuse d’un très étrange passé. Un moment de vérité où il fait l’expérience de ses défaillances et se sent coupable à la suite d’évènements tragiques. Même s’il sait que l’homme n’est pas maître de son destin, il tente d’en saisir le sens jusqu’au vertige.
À travers ce récit résonne une histoire d’exil, de transgression, de passion amoureuse, et de complexité d’un homme face à ses choix les plus terribles.

Mon avis :
« Il faut croire que les mots creusent parfois des galeries souterraines, mystérieuses, et que ce que l’on croit enfoui, oublié ou perdu à jamais, ne demande qu’à ressurgir au moment le plus inattendu. Ils nous saisissent au col, et on n’y peut rien. À Ellis, les harpes s’étaient tues. Je l’avais enfin compris. »

tumblr_mzv0t0hP3s1tqy8p1o5_500John Mitchell, le dernier gardien d’Ellis Island a fait toute se carrière en ce lieu d’espoir et d’humiliation pour des millions d’immigrants venus de toute l’Europe, rêvant d’une vie meilleure au pays de la statue de la Liberté. Dévoué, efficace, il connaît les moindres replis de ce labyrinthe. Il fut le témoin du passage des exilés, des militaires en entraînement pendant la seconde guerre mondiale puis des prisonniers politiques.
A la veille de son départ et de la fermeture du site, John écrit ce journal vibrant sur les rencontres qui ont marqué sa vie en ce lieu. Il y a bien sûr sa femme Liz, jeune sœur de son meilleur ami et infirmière, venue travailler avec lui sur Ellis Island. Mais aussi cette immigrée italienne, Nella Casarini, partie de Sardaigne avec son frère dément. Les raisons de sa fuite, l’espoir d’un eldorado, la réalité accablante d’une traversée, l’exclusion à la Porte d’or d’un individu jugé indigne de la belle Amérique sont un des témoignages de l’espoir et de la douleur de l’exil.
« Il faut imaginer la fragilité, la folle énergie, la détresse et la détermination de toutes celles, de tous ceux qui ont un jour accepté l’idée, pour fuir la misère ou la persécution, de tout perdre pour peut-être tout regagner, au prix d’une des plus terribles mutilations qui soient : la perte de sa terre, des siens, la négation de sa langue et parfois celle de son propre nom, l’oubli de ses rites et de ses chansons. Car seule cette mutilation consentie pouvait leur ouvrir la Porte d’or. »
Si Nella a particulièrement marqué John dans son corps et son esprit, d’autres témoignages, comme ceux de l’anarchiste Francesco Lazzarini, du couple Kovacs ( un écrivain imaginaire qui parle si bien de l’île aux 29 questions) ou même les photos de Sherman ( personnage réel d’Ellis Island revu par l’auteur) accentuent la tragédie de ce moment suspendu entre l’espoir et la réalité de l’exil.

« Oscillant entre mémoire et nostalgie, comme entre Charybde et Scylla, ils ont dû avancer, et oublier pour survivre. C’est à Ellis Island, triste athanor, que s’effectuent les prémices de cette transmutation, oui, à Ellis Island, grotte d’oubli et de renoncement, entre des espaces ouverts à tous les vents, ceux de la souffrance et du désespoir. Ellis Island, marchepied d’une terre désirée et d’un rêve à construire. Et dans ce non-lieu s’agitent les gardiens du temple, visages glabres en uniforme et barbus en costumes sombres, infinité de blouses blanches préposées à l’éradication des poux, portefaix chargés de la bonne circulation dans la fourmilière. À Ellis Island, le temps n’existe plus, l’attente en est la seule mesure. Vous qui entrez ici, sachez que toutes montres et horloges y ont été fracassées, vous resterez ici quelques heures ou de longues semaines, mais vous l’ignorez, vous ne découvrirez la durée de votre passage qu’heure après heure et jour après jour. »

Gaëlle Josse a décidé d’écrire ce roman à la suite de sa visite à Ellis Island. Elle s’est imprégnée du lieu, a compris la détresse des visages sur ces photos réellement prises par Sherman. Avec sa sensibilité et sa façon exceptionnelle de transcrire les émotions de ses personnages, comment ne pas ressentir de compassion et d’amour à la lecture de ce livre? Et si l’auteur n’a pas su faire germer en vous les images de ces regards perdus, de ces vies déracinées, de ses espoirs figés, je vous conseille d’aller visiter le trumblr de l’auteur qui en images (la photo de mon article est empruntée à ce site) et en musiques finira de vous plonger corps et âme dans cette période, symbole d’un eldorado toujours d’actualité en d’autres lieux.

Art, musique, histoire, Gaëlle Josse traduit les instants qui l’interpellent en d’inoubliables petits romans qui relaient si bien ses émotions dans un style narratif et poétique remarquable et maîtrisé.Depuis le succès de son premier roman, Les heures silencieuses ( Autrement 2011), Gaëlle Josse percute l’émotion du lecteur à chaque récit.

Lisez un extrait du livre sur le site de l’éditeur

Lu en commun avec Mimi et sa chronique est ici.

rentrée bac2014

 

 

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

18 septembre 2014 à 15 h 38 min

Gaëlle Josse parvient à se renouveler, et, chaque fois à retenir son lecteur.
C’est chouette de pouvoir faire des lectures communes, et d’apprécier à deux un même ouvrage sans forcément l’aborder de la même manière



18 septembre 2014 à 19 h 18 min

Ce livre fait parti de ceux que j’aimerais beaucoup lire et ton avis est très très convainquant : merci 🙂



18 septembre 2014 à 20 h 21 min

Celui-ci fait partie de ma wish-list : ton billet confirme l’intérêt que je lui porte. Je le réserve pour ma prochaine excursion chez mes libraires préférées.



valmleslivres
18 septembre 2014 à 20 h 59 min

Je n’ai jamais lu cette auteure, si je le fais, ce sera avec ce titre dont le thème me tente.



eimelle
18 septembre 2014 à 21 h 42 min

il est dans mes prévisions de lecture!



18 septembre 2014 à 22 h 11 min

Une fois encore, je note !!



kp78
20 septembre 2014 à 9 h 10 min

Très beau billet. Je viens de terminer le livre et ai beaucoup aimé. C’est le troisième livre que je lis de cet auteur et n’ai jamais été déçue.



alexmotamots
20 septembre 2014 à 19 h 49 min

Un lieu chargé d’histoire que j’ai eut la chance de visiter.



22 septembre 2014 à 11 h 25 min

C’est une romancière qu’il faut je lise, j’en lis tellement de bien sur tous vos blogs !



Brigitte
23 janvier 2015 à 9 h 25 min

Rencontre avec Gaëlle Josse hier dans ma librairie de Poitiers, plus d’une heure passionnante, si elle vient près de chez vous, n’hésitez pas. Ses réponses ressemblent à ses livres, sensibles, aiguës…



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