Titre : Autoportrait de Calcutta

Editeur : Seuil

Auteur : Catherine Clément

Editeur : Seuil

Nombre de pages : 256

Date de parution : 6 mai 2021

 

 

 

Je suis Catherine Clément depuis ma lecture de son roman Le voyage de Théo, un des cinq livres que j’emmènerais sur une île déserte. Cette historienne, spécialiste de l’Inde, a une façon très romanesque de faire découvrir et apprécier l’Histoire.

 

Dans ce nouveau roman, elle donne la parole à une ville. C’est Calcutta, une des villes du monde à la plus forte densité de population, qui nous parle.

Je ne suis pas née indienne, savez-vous ? Et je ne suis pas née sous le nom de Kolkata. Il y avait bien ici un hameau de quelques bicoques paysannes qui s’appelait Kalikata, dont les Anglais ont extrait « Calcutta ». Mais ce sont eux, les Anglais, qui m’ont portée à l’état de ville. Eux, tout seuls.

Comptoir marchand depuis 1600 suite à une négociation entre l’empereur moghol, Akbar le Grand et la reine Elisabeth Ière, devenue coloniale en 1757 puis intégrée à l’empire britannique suite à la guerre des Cipayes, Calcutta, née anglaise, est la capitale anglo-indienne du Bengale. Elle voit sa population s’envoler à l’Indépendance suite à la famine de 1943 puis à la partition en 1947. Deux millions de réfugiés afflueront encore en 1971 après la guerre d’indépendance du Bangladesh. Le roman de Dominique Lapierre, La cité de la joie, illustre toutes les conséquences de cette surpopulation dans les bidonvilles.

Notre narratrice très singulière part de divinités ( Kali bien sûr qui a donné son nom à Kalikata, Ramakrishna, le plus grand saint mystique du Bengale), de monuments ( mémorial de la reine Victoria, Palais du gouvernement, cathédrale Saint-Paul, le pont de Howrah, le monastère de la félicité…), de rites ancestraux ( fêtes de Dourga puis de Kali), de personnalités ( son préféré, Rabindranath Tagore , mère Teresa, frère Gaston Dayanand et le père François Laborde, quelques officiers anglais) de livres ou films pour décrire son parcours de sa naissance anglaise à sa réalité d’aujourd’hui.

Calcutta balaie des siècles d’histoire et elle me perd un peu dans la partie la plus ancienne. Si je connais un peu l’histoire de l’Inde depuis Gandhi, j’ai peiné sous l’afflux de noms de militaires anglais ou politiques indiens. De ces courtes évocations, j’y ai glané des choses intéressantes ( l’évocation des Bibis, compagnes des officiers anglais, des Bauls dont les chants sont inscrits au patrimoine immatériel de l’Unesco, les peintures de Kâlighât, les poèmes devenus hymnes nationaux, le parcours nazi de Subras Chanda Bose, l’origine du scénario d’E.T., la guérilla naxalite…) mais le récit non chronologique d’une grande richesse est assez ardu à suivre.

Si je suis utile au vaste monde, c’est à cause du compliqué. Avec moi, rien n’est simple. Je suis anglo-indienne et communiste, maoïste et nationaliste, violemment révolutionnaire et mystique, dense et mutine, nazie et libertaire, je m’appelle Contradiction.

En donnant sa voix à Calcutta, l’auteur peut se permettre de saluer quelques personnalités et d’en épingler d’autres comme Claude Levi-Strauss ou Louis Malle qui n’ont pas su capter l’âme de Calcutta. Elle peut s’amuser de la visite de François Mitterrand venu remettre la légion d’honneur au cinéaste Satyajit Ray avec lequel Gérard Depardieu collaborera. Autant de petites anecdotes qui pimentent le récit mais provoquent aussi le grand écart avec des références plus historiques.

A l’image de la sculpture de Subir Pal, Catherine Clément construit une petite boîte qui définit Calcutta . Divinités, personnalités sculptées de différentes tailles et matières pour dresser un portrait de cette ville. Dans la boîte de Pal, il n’y a que deux femmes, Kali et Indira Gandhi. Et elles sont plutôt cruelles. Rien sur la begum Rékoya, une féministe qui a dit en 1904 :

Chaque fois qu’une femme veut relever la tête, les armes des religions ou des écrits sacrés frappant cette tête. Les religions resserrent le joug de l’esclavage autour des femmes et justifient la domination mâle sur les femmes.

Alors pour finir sur une note féministe, l’auteure évoque trois jeunes femmes, une femme politique poète, une philosophe et une écrivaine. Trois femmes belles et courageuses, Gayatri Charkravotry Spivak, Shumona Sinha et Aruna Asaf Ali. Mais une fois de plus, face à tous ces noms, je reste sur ma faim. Pour une fois, il me semble que Catherine Clément n’a pas su se mettre à la portée du lecteur moyen.

Auteur

contact@surlaroutedejostein.fr

Commentaires

7 mai 2021 à 13 h 59 min

je n’ai pas relu se livres depuis « Le voyage de Théo » j’ai noté celui-ci pour me replonger dans son univers et un petit tour en Inde ne se refuse pas 🙂



7 mai 2021 à 14 h 03 min

Mouiais, il y a sans doute des romans plus accessible au lecteur lambda concernant l’Inde.



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